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Face à la situation historique actuelle et face aux enjeux et aux questions qu'elle pose au prolétariat international, comment les groupes communistes d'aujourd'hui répondent et défendent la perspective de la destruction du capitalisme et de la révolution communiste ? Quelle intervention développent-ils ? Dans ce bulletin, nous avons déjà relevé, en différentes occasions (telles la guerre en Irak, les attentats terroristes de Madrid de mars 2004, les grèves ouvrières de 2003 en France, d'Italie, de Grande-Bretagne, d'Allemagne en 2004) les positionnements des principaux groupes qui se réclament de la Gauche communiste et qui continuent d'avoir une activité et une intervention régulières. En particulier, nous avions noté que si le BIPR et le PCI-Le Prolétaire réussissaient à se situer du côté de la barricade opposé à la bourgeoisie, du côté des intérêts historiques et immédiats du prolétariat, le CCI avait de plus en plus une fâcheuse tendance à se situer du même côté que les forces politiques et idéologiques bourgeoises, avec les mêmes arguments voire les mêmes positionnements concrets (en particulier contre les grèves en France et en Allemagne). Nous renvoyons nos lecteurs au rapport d'activités de la fraction publié dans le précédent bulletin sur un bilan de l'involution politique du CCI. Est-ce que, à l'occasion des événements ayant eu lieu cet été, depuis les attentats de Londres en juillet, ces dynamiques et positionnements opposés et contradictoires se confirment encore, voire s'accentuent ? Ou bien s'inversent-ils ?
Pour faire ce qui s'apparente à une "photographie", un "état des lieux" à un moment donné - et non tout un bilan comme le faisait notre rapport -, nous nous sommes basés sur les derniers numéros des principales publications de ces organisations (Revolutionary Perspectives n°36 pour le BIPR via sa publication anglaise de l'été 2005, sur Le Prolétaire n°477 de juin-juillet-août 2005 du PCI "bordiguiste" et sur Révolution internationale n°360, la publication du CCI en France, de septembre 2005). Au passage, nous aurons aussi l'occasion de citer d'autres numéros et publications.
Mais avant même de commencer, il convient de noter que nous avons été "agréablement" surpris par le contenu et l'orientation générale du RI de septembre qui marque, pour le moins, en particulier dans son éditorial, une opposition aux numéros antérieurs et à la politique développée par le CCI ces dernières années. Tournant politique de fond ou accident dû à des restes de marxisme et de conviction communiste ? Nous allons y revenir pour constater qu'il s'agit malheureusement d'un simple accident...
Depuis le 11 septembre 2001, la perspective de la guerre impérialiste mondiale généralisée entre les principales puissances capitalistes du monde est revenue au premier plan de la situation. Avec la reprise, encore limitée, des luttes ouvrières, c'est elle qui détermine l'évolution de la situation. En particulier, la cristallisation et la polarisation croissante entre deux axes impérialistes, Etats-Unis d'un côté, Allemagne-France de l'autre, est la fois la conséquence et un facteur de cette marche vers la guerre impérialiste. Le terrorisme et sa généralisation comme moyen, comme arme, de cet affrontement entre puissances, et la mise en avant de l'alternative-piège, terrorisme-antiterrorisme contre la classe ouvrière, avait déjà été utilisé lors des attentats du 11 septembre à New-York. Puis relancé de nouveau lors des attentats de mars 2004 à Madrid. Après les attaques terroristes sur Londres de juillet dernier, la question du terrorisme et surtout de l'usage de l'antiterrorisme est au premier plan de l'offensive idéologique et mystificatrice de la bourgeoisie au plan international contre l'ensemble du prolétariat.
Nous nous limiterons simplement à reprendre les prises de position suite aux attentats de Londres et donc à la question de la situation impérialiste et, rapidement, sur l'ouragan Katrina et la destruction de la Nouvelle-Orléans.
Pour l'ensemble des publications citées - y inclus le numéro de Révolution internationale de septembre -, "la période présente est celle où les alliances pour la prochaine guerre mondiale sont en train de se faire. Et d'ores et déjà les lignes des nouveaux blocs deviennent apparents (...). Ces développements mènent dans la direction de conflits plus larges et plus généraux entre les principales puissances" (Revolutionary Perspectives 36, "Bombings, War, Oil"). Pour Le Prolétaire, "le massacre de Londres survient à un moment où les contrastes entre les Etats impérialistes qui dirigent le monde ne tendent pas du tout à se résorber, mais au contraire à s'aggraver". L'éditorial de RI, de manière certes timide, mais surprenante et nouvelle, développe dans le même sens comme nous le verrons par la suite. Ce n'est pas la première fois que le BIPR et le PCI-Le Prolétaire mettent en évidence la tendance inéluctable à la bipolarisation impérialiste. C'est un élément fondamental pour pouvoir dénoncer concrètement, réellement, et dans l'affrontement à la bourgeoisie, la seule perspective que celle-ci offre à l'humanité : la guerre impérialiste mondiale. Sans la mise en évidence concrète des pas réels accomplis dans ce sens, tels les choix et les alignements impérialistes des principales puissances, la dénonciation de la guerre impérialiste généralisée devient formelle et abstraite. C'est-à-dire au mieux impuissante, au pire comme le masque de l'opportunisme et du révisionnisme.
Cette compréhension de l'accélération des tensions et de la polarisation impérialistes permet de dénoncer concrètement, pratiquement, la signification réelle de l'abandon des armes par l'IRA en Irlande. Pour Revolutionary Perspectives, "les pressions britanniques et irlandaises ont fait peu de différence. Le véritable changement est arrivé seulement quand l'appui financier américain à l'IRA a commencé à se tarir. Ce n'est que quand le Sinn Fein a vu quelle était la position des Etats-Unis qu'il a commencé à repenser sa stratégie. Depuis Septembre 2001, toute action armée spectaculaire a été exclue par l'Etat américain qui, en dernier ressort, contrôle le flux de fonds. Aujourd'hui, «la guerre contre le terrorisme» à l'échelle mondiale des Etats-Unis a pris l'IRA et le Sinn Fein sous son feu croisé. Cela ne convient plus aux plans américains alors que la loyauté dévoué de l'appui britannique aux Etats-Unis en Irak lui a au moins apporté ce bénéfice. (...) La force et l'engagement de la coalition anglo-américaine se sont renforcés car la guerre en Irak a fait des deux puissances anglo-saxonnes des alliés plus proches" (The IRA "Stand-down").
Mais c'est surtout dans l'article sur Le futur de l'Union européenne que RP montre l'importance de ce cadre de compréhension. En effet, alors que l'article voit une crise dans l'Union européenne, - "le fait que cette Constitution ait été repoussée dans les référendums de mai en France et aux Pays-Bas a provoqué une crise" -, cette erreur d'analyse (selon nous) n'empêche pas la CWO de mettre en avant la dynamique fondamentale qui traverse l'Europe : "Les Etats centraux [d'Europe] sont pour l'évolution de l'Union européenne en un pôle impérialiste pour contrer les Etats-Unis. D'autres membres de l'UE, en particulier le Royaume Uni et quelques Etats européens de l'Est, ont peur de la construction d'un nouveau pôle impérialiste car ils voient tout à fait justement que cela amènera au conflit avec les Etats-Unis. En fait, le conflit avec les Etats-Unis a déjà lieu et ils craignent son escalade". Et les camarades de la CWO de conclure que "cela est l'arrière-plan de cette crise actuelle".
Tant le PCI-Le Prolétaire que le BIPR réaffirment clairement l'alternative historique à la guerre impérialiste généralisée : la révolution communiste. "Du fait des contradictions inhérentes au système capitaliste, cette crise [économique] va s'intensifier. A son tour, cela va intensifier la dérive vers la guerre. La seule manière pour éviter cela, est en renversant le système capitaliste de production (...). La seule force capable de renverser le système capitaliste est la classe ouvrière. C'est pour cela que le seul éclair de lumière dans ce panorama sombre a été la grève des travailleurs de l'aéroport de Heathrow " (RP 36). RI de septembre termine son article "Le terrorisme est une arme de guerre de la bourgeoisie" sur la même perspective en se basant aussi sur la grève à Heathrow.
De même, toutes ces publications, et donc tous les groupes se revendiquant de la Gauche communiste, dénoncent l'utilisation du terrorisme par la bourgeoisie. Après avoir dénoncé les attentats de Londres et l'utilisation du terrorisme par la bourgeoisie dans l'histoire, RP conclut que "le terrorisme est une partie intégrante de l'arsenal de la classe capitaliste. Ce n'est pas, cependant, une arme qui puisse être utilisée par la classe ouvrière". Le titre de l'éditorial de RI est sans équivoque - "le terrorisme est une arme de guerre de la bourgeoisie" - et même Le Prolétaire dénonce tant le "terrorisme des grands Etats impérialistes" que celui "des fondamentalistes islamistes".
Il nous semble très important de souligner que les seules forces politiques qui dénoncent clairement le terrorisme sous toutes ces formes bourgeoises, sont les forces politiques qui se revendiquent ouvertement et clairement de la Gauche communiste, en l'occurrence de la Gauche dite italienne. Il y a là un héritage commun qui reste vivace parmi ces groupes et qui leur permet de se maintenir sur des positions de classe.
Pour le BIPR, "les attentats de Londres ont un lien direct avec la lutte au Moyen-Orient et ont leur base matérielle dans la lutte pour le contrôle des ressources de la région. Ils sont un événement supplémentaire dans la lutte pour le contrôle du pétrole de la région (...). La classe dominante américaine, avec la britannique comme partenaire, veut contrôler les ressources en pétrole de la région, de la Mer Rouge au Caucase, alors que les éléments de la bourgeoisie arabe, y inclus Al Quaeda, visent à contrôler ce pétrole pour eux-mêmes " (RP 36, Terrorism and Class Politics). "Les factions locales de la classe capitaliste exigent de les contrôler [les ressources pétrolifères] et développent leur campagne de résistance" (idem, éditorial Bombings, War and Oil). Le Prolétaire met en avant la même analyse : "Le terrorisme des mouvements nationalistes (qu'ils soient laïques ou religieux) est le moyen utilisé par les fractions bourgeoises plus faibles pour résister à la pression écrasante des grands impérialismes".
Les deux dénoncent aussi, nous l'avons souligné plus haut, le terrorisme des "grands" Etats impérialistes. Néanmoins, l'insistance - relative - qui est faite ici sur la responsabilité des bourgeoisie arabes locales, laisse la porte ouverte - Le Prolétaire l'exprime ouvertement dans ce passage "pour résister à la pression écrasante des grands impérialismes" présentés comme un tout opposé aux bourgeoisies arabes plus faibles - à l'idée propagée par la bourgeoisie internationale d'une lutte contre le fanatisme islamique, voire de "l'occident" contre les nations arabes. Pour nous, ce qu'il importe de dénoncer au premier chef, c'est la responsabilité directe des grandes puissances impérialistes dans les attentats de Londres, comme dans ceux de Madrid, et d'ailleurs.
Curieusement - curieusement parce que le CCI nous avait habitué à tout expliquer, et en particulier, le terrorisme, comme une expression de la décomposition et du "chacun pour soi" incontrôlé -, il nous semble que l'éditorial de Révolution internationale de septembre avance la position la plus claire, celle-là même que nous partageons et défendons dans nos bulletins : "Ce sont de plus en plus clairement tous les Etats, grands ou petits, qui commanditent, infiltrent, manipulent, utilisent les fractions, groupes et nébuleuses terroristes, partout dans le monde pour défendre ou faire valoir leurs sordides intérêts". C'est d'autant plus "curieux" que cela est en contradiction avec une position que le CCI a développée ces dernières années, sur la perte totale de contrôle des grandes puissances impérialistes sur les groupes terroristes, et que le 16e congrès international vient pourtant encore de réaffirmer. Mais laissons cela pour l'instant.
Pour notre part, nous avons mis en avant que le véritable danger pour la classe ouvrière était d'ordre idéologique et politique autour de ce que nous avons qualifié "d'alternative-piège, terrorisme-antiterrorisme". Comme toujours, le prolétariat est la principale victime physique des différents affrontements impérialistes quelles que soient leur forme et leur intensité. L'ensemble de la Gauche communiste dénonce ce fait. Mais, c'est surtout l'utilisation idéologique et politique d'une part, et policière de l'autre, de ces attentats par l'ensemble des bourgeoisies nationales, au premier plan les principales d'entre elles, qui est le véritable danger pour le prolétariat.
"Les attentats se sont révélés un prétexte très utile pour nos dirigeants afin de faire ce qu'ils voulaient faire de toute manière. Le terrorisme fournit à la classe dominante l'excuse parfaite pour augmenter la répression. Alors qu'aujourd'hui, ces mesures sont dirigées contre les groupes et mouvements islamistes, demain ils seront utilisés contre les organisations et les militants de la classe ouvrière" (RP, Terrorism and Class Politics). Le CCI aussi dans ses différentes prises de position dans ses publications dénonce les mesures de répression prises par la bourgeoisie en cette occasion. "Les campagnes anti-terroristes actuelles ont permis de justifier avant tout un renforcement sans précédent de l'appareil répressif" (RI 360 de septembre). Tous les groupes sont clairs sur cette question.
Dans un premier temps, il semble qu'il ait existé une tendance dans le camp prolétarien à voir dans les attentats terroristes, ceux de Madrid et de Londres en particulier, une attaque ciblée contre la classe ouvrière. "Comme à New York en 2001 et à Madrid en 2004, les bombes visaient délibérément les ouvriers, les gens qui s'entassent dans les métros et les bus pour aller au travail" (RI, prise de position du CCI sur les attentats de Londres, 7 juillet 2005). Le Prolétaire reproduit cette position quand il affirme que "les cibles de ces organisations confessionnelles bourgeoises ne sont pas les dirigeants des Etats impérialistes qui mènent des guerres de rapine en Afghanistan, en Tchétchénie ou en Irak, mais la population civile, les prolétaires qui utilisent les moyens de transport publics".
Nous avons rejeté cette vision dans notre bulletin précédent (cf. bulletin 32, Terrorisme, anti-terrorisme : instruments de la bourgeoisie dans sa marche à la guerre). Cette vision d'une classe ouvrière cible, comme telle, des attaques terroristes ouvre la porte à l'impuissance de la classe ouvrière et surtout à sa soumission aux campagnes antiterroristes. Reconnaissons de suite ici que l'article du Prolétaire ne franchit pas du tout la porte qui est ouverte, en rejetant toute "Union sacrée" : "Il n'y a pas d'intérêts communs entre prolétaires et bourgeois ni sur le plan immédiat, ni sur le plan politique plus général (...). Toute solidarité que demandent les bourgeois, quel qu'en soit le prétexte, doit être refusée par les prolétaires parce que ce n'est toujours qu'une solidarité envers les intérêts bourgeois, des profits bourgeois, des propriétés bourgeoises, des Etats bourgeois. Le prolétariat ne pourra jamais lutter contre le terrorisme bourgeois en commun avec les bourgeois ou sous leur direction. Il ne pourra lutter contre le terrorisme bourgeois que dans le cadre de sa lutte de classe contre la bourgeoisie, contre les intérêts, les profits, la propriété et l'Etat bourgeois" (souligné dans le texte).
De nouveau, l'article éditorial de Révolution internationale de septembre avance clairement que "l'Etat bourgeois profite des sentiments d'insécurité permanente, de peur et d'impuissance suscités par de tels actes dans les populations pour se présenter comme le seul rempart possible contre la montée du terrorisme"
Il y a donc une tendance affirmée à ce que les groupes du camp prolétarien dénoncent l'idéologie de l'anti-terrorisme dans la période présente. Cela est très important, voire fondamental, alors même que l'ensemble des forces politiques bourgeoises, et particulièrement celles de "gauche", gauchistes compris, appellent l'Etat à prendre toutes les mesures nécessaires pour enrôler la classe ouvrière derrière lui et derrière sa campagne. Malheureusement, si le RI de septembre semble inscrire le CCI dans cette dynamique, le RI d'octobre, tout comme nombre de prises de position des autres publications de cette organisation, ont depuis démenti et contredit ce numéro. La prise de position du CCI sur la catastrophe de La Nouvelle-Orléans en est la première expression surtout quand elle regrette l'absence de la Garde Nationale et la faiblesse des forces de police dont on a vu... les méthodes "originales" dans les opérations de sauvetage.
Ce numéro, et surtout son éditorial, sont en complète contradiction avec les prises de position antérieures et postérieures du CCI dans ses diverses publications. Et surtout il contredit différents éléments centraux de la résolution sur la situation internationale adoptée, il y a à peine quelques mois, par le 16e congrès international de cette organisation. Voyons plutôt :
Le terrorisme est-il, oui ou non, contrôlé et manipulé par les Etats ? Voilà comment le RI de septembre répond :
"Les Etats ne combattent pas le terrorisme. Ce sont eux qui le sécrètent et le font prospérer. Ce sont de plus en plus clairement tous les Etats, grands ou petits, qui commanditent, infiltrent, manipulent, utilisent les fractions, groupes et nébuleuses terroristes partout dans le monde pour défendre ou faire valoir leurs sordides intérêts. Le terrorisme est aujourd'hui devenu une arme de plus en plus fréquemment utilisée dans la guerre ouverte ou larvée que se livrent les bourgeoisies du monde entier" (nous soulignons dans toutes les citations).
L'article de RI de septembre affirme justement selon nous, et très clairement que le terrorisme est aujourd'hui, "de plus en plus clairement" même, "commandité, infiltré, manipulé, utilisé" par les Etats. Voilà, en complète contradiction, ce que dit la résolution sur la situation international du 16e congrès adoptée sans doute à l'unanimité, nous n'en doutons pas puisqu'il n'est fait état d'aucune discussion contradictoire sur le sujet dans le compte-rendu de cette réunion.
"Dans ce processus, le phénomène croissant du terrorisme, qui est souvent le produit de l'action de fractions de la bourgeoisie qui ne sont plus contrôlées par aucun Etat en particulier, constitue un élément supplémentaire d'instabilité et ramène ces conflits meurtriers au cœur même du capitalisme (11 septembre, attentats de Madrid)" (point 5 de la résolution, Revue internationale 122).
Y-a-t-il, oui ou non, un danger de guerre impérialiste ? Voilà comment RI de septembre se prononce sur le sujet :
"Il n'existe pas de solution-miracle, immédiate, qui permette du jour au lendemain d'empêcher les attentats terroristes, pas plus que la guerre impérialiste de se déchaîner sur la planète".
L'éditorial de ce numéro met clairement en avant la perspective du "déchaînement de la guerre impérialiste sur la planète". On peut jouer avec les mots et affirmer qu'il n'utilise pas l'expression "guerre mondiale" ou "guerre généralisée". Nous ne doutons pas que les liquidateurs s'emploieront à "argumenter" dans ce sens. Néanmoins, au jour d'aujourd'hui où les guerres locales se multiplient, essentiellement à l'initiative et alimentées par les grandes puissances impérialistes, parler du futur déchaînement de la guerre impérialiste sur la planète renvoie clairement à la perspective de la guerre impérialiste généralisée. Et pourtant, c'est exactement cette perspective que la résolution du 16e congrès vient de rejeter explicitement :
"Ainsi, même si la guerre mondiale ne constitue pas la menace concrète pour l’humanité qu’elle a été pendant la plus grande partie du 20e siècle, l’alternative socialisme ou barbarie reste tout aussi urgente qu’elle l’était auparavant. (...). La crise aujourd’hui, dans l’incapacité de déboucher sur la guerre mondiale, est le facteur primordial de la décomposition du système. Elle continue donc à pousser le système vers son autodestruction" (points 6 et 14).
Disons enfin un dernier mot sur les prises de position sur la destruction de La Nouvelle-Orléans après le passage de l'ouragan Katrina. C'est l'occasion pour le CCI, et donc pour le RI d'octobre, de publier une prise de position qui marque le retour clair à l'opportunisme déclaré.
Le Groupe Internationaliste Ouvrier, la section du BIPR au Canada a publié une prise de position le 2 septembre, dont nous partageons le contenu et la dénonciation... de classe : "Les inondations causées par l’ouragan Katrina ont créé un désastre social de proportion épique et cela a une fois de plus illustré la réalité écoeurante de la société capitaliste qui accorde plus d’importance à la propriété qu’à la vie humaine. (...) Des unités de policiers lourdement armés imposent la loi martiale sur les zones les plus gravement touchées dans le but de défendre la propriété contre les pilleurs, dont bon nombre ne cherchent qu’à assurer leurs besoins de base. Presque toute la force policière de la ville a été retirée des opérations de sauvetage et affectée aux actions contre le pillage. 10 000 gardes nationaux vont être déployés.(...) Cette tragédie met brutalement en lumière la nature d’un système capable de construire la plus grande machine de guerre impérialiste de l’histoire et qui ne se donne même pas la peine de planifier dans l’éventualité d’une catastrophe naturelle." A son tour, Battaglia Comunista de septembre, dans Katrina : ou on met fin au capitalisme ou c'est la barbarie, dénonce l'envoi "de l'armée avec des hommes armés de pied en cap avec l'ordre de tirer à vue sur quiconque rôderait autour d'un supermarché ou d'un quelconque magasin même si à la recherche d'eau ou d'aliments. En défense de la propriété privée, ont même été utilisés les forces militaires aériennes qui n'ont pas hésité à mitrailler d'en haut tous ceux qui tentaient de la violer...". Pour être complet sur la dénonciation des camarades, mentionnons qu'ils dénoncent la responsabilité unique du capitalisme dans la situation de chaos qui a suivi.
Néanmoins, encore une fois, ce qu'il importe de dénoncer devant l'ensemble du prolétariat international, et ce que fait le BIPR, c'est la mise en avant - comme pour le Tsunami en Asie - au nom de "l'humanitaire", de la "solidarité humaine", des forces armées des Etats bourgeois qui sont envoyées soit pour le maintien de l'ordre, soit pour affirmer une présence impérialiste contre les rivaux. Ce pour quoi elles sont constituées, entraînées, envoyées. Est-il besoin de dire ici que c'est l'ABC du marxisme ?
Et pourtant, après l'heureuse surprise du RI de septembre, notre organisation rechute lourdement dans ces errements opportunistes en cette occasion en reprenant les arguments des "organisations non gouvernementales" (ONG) - "non-gouvernementales" mais pas moins "étatiques" - et des humanistes de tout ordre.
Après une dénonciation générale du capitalisme - "le capitalisme est responsable de la catastrophe sociale !" -, suit immédiatement une reprise et une mise en avant des thèmes idéologiques les plus vulgaires de ce même capitalisme : "l'incapacité du capitalisme à répondre à cette crise avec le minimum de solidarité humaine démontre que la classe capitaliste n'est plus digne [sic] de gouverner, que son mode de production est embourbé dans un processus de décomposition sociale". Est-il besoin de souligner au lecteur tout le contenu bourgeois de ces phrases et leur implication politique ? Si la classe capitaliste "n'est plus digne de gouverner" car elle est incapable de "répondre à cette crise avec le minimum de solidarité humaine", cela signifie que la classe capitaliste a pu manifester dans le passé un "minimum de solidarité humaine" - qu'est-ce que la "solidarité humaine" dans une société de classe ? - et, donc, qu'elle était alors "digne de gouverner". Mais quand a-t-elle cessé de manifester "le minimum de solidarité humaine" ? Ou plutôt jusqu'à quand a-t-elle été "digne de gouverner" ? Jusqu'à l'apparition de la décomposition sociale si l'on en croit la phrase qui suit, soit selon la théorie du CCI jusqu'à la fin des années... 1980 ! On le voit, au détour d'une simple petite phrase, tous les acquis du marxisme et du mouvement ouvrier sont abandonnés et son histoire déformée.
C'est ainsi que la dénonciation du capitalisme est vidée de son contenu concret et devient abstraite et ouvertement opportuniste avec la mise en avant, une fois de plus, du mot d'ordre de "solidarité humaine". Et, évidemment, ce concept bourgeois ne va pas sans conséquences politiques. Elles apparaissent, une fois de plus, assez rapidement et sont à mettre en parallèle, ou plutôt en opposition, aux citations précédentes du BIPR :
"Ce n'est pas non plus une force naturelle qui a considérablement réduit la Garde nationale de Louisiane, mais la guerre en Irak dans laquelle une grande partie de ses troupes a été mobilisée, ne laissant que 250 gardes disponibles pour assister la police et les pompiers dans les actions de secours...". A son tour, le CCI en arrive à "souhaiter" pour le moins l'intervention plus rapide encore de l'armée pour les "opérations de sauvetage humanitaire", c'est-à-dire pour le maintien de l'ordre bourgeois par la répression meurtrière.
L'étude rapide et sommaire de quelques numéros de ces publications vient corroborer la réalité du camp prolétarien actuel, et en particulier elle vient confirmer qu'il est traversé de deux dynamiques contradictoires, l'une dans le sens de la clarté politique et du regroupement révolutionnaire, l'autre dans le sens de la révision politique et de l'opportunisme sectaire.
Même si nous portons des critiques aux prises des positions du BIPR et du PCI-Le Prolétaire, en tenant compte bien sûr de leurs positions programmatiques propres particulièrement concernant le deuxième, il faut souligner qu'elles se situent sans équivoque dans le sens des intérêts du prolétariat et dans le sens de la perspective révolutionnaire du prolétariat. Les critiques que nous portons, au-delà des nuances ou différences d'analyses - la supposée crise de l'UE par exemple selon Revolutionary Perspectives - sont surtout dans une hésitation, ou une prudence, pour affirmer les perspectives dont sont porteuses les différentes dynamiques en cours aujourd'hui : la dynamique à la bipolarisation comme expression et facteur de ce que nous avons appelé "la marche à la guerre de la bourgeoisie" ; la reprise des luttes ouvrières (tout en tenant compte que cette question est liée aussi à la notion de "cours historique" que rejette le BIPR et, en partie, le PCI-Le Prolétaire). Mais ces deux organisations s'inscrivent résolument et de manière constante dans la situation réelle et y répondent en apportant analyses, dénonciations, et perspectives à la classe ouvrière et aux minorités révolutionnaires.
La réalité opportuniste et révisionniste du CCI actuel se confirme elle aussi. Et, malheureusement le numéro de septembre de RI, tout comme hier Rivoluzione internazionale, la publication en Italie, tout comme parfois certains articles isolés ici ou là, ne vient pas démentir cette affirmation, ni exprimer une réelle contre-tendance à la tendance liquidationniste, et encore moins malheureusement incarner une résistance politique affirmée, organisée, à la dérive de notre organisation. Encore une fois, cette résistance, s'il devait en exister une autre que notre fraction, a de moins en moins de chances de voir le jour ; plus le temps passe et plus les militants sont obligés d'avaler couleuvres organisationnelles et politiques sur couleuvres.
Par contre, le RI de septembre vient confirmer ce que nous affirmions dans notre rapport d'activités publié dans le bulletin précédent : non seulement, le CCI n'est pas mort pour le prolétariat mais en plus des réflexes prolétariens et marxistes peuvent encore surgir ici ou là quand la pression et la vigilance du liquidationnisme s'exerce un peu moins fortement. Cela veut dire qu'il y a encore un combat à mener pour "sauver" ce qui peut encore être sauvé - déjà notre combat a pu sauvegarder un certain nombre d'acquis et une histoire - et que cette bataille peut durer encore un certain temps.
13 octobre 2005.
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