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DEBAT AU SEIN DU CAMP PROLETARIEN
A propos d'un article du journal Le Prolétaire
Défense de la conception du CCI sur la conscience de classe

Dans le n°473 de leur journal Le Prolétaire (sept./oct. 2004) les camarades du Parti Communiste International (PCI) rendent compte d'un débat qu'ils ont organisé lors d'un forum à la fête de l'organisation trotskiste Lutte Ouvrière.

De ce qui est dit à propos des positions défendues par les camarades du PCI lors de ce débat, nous n'avons pas grand chose à ajouter à ce que nous disions dans notre bulletin n°25 (1) : la vision défendue par les camarades est globalement juste, bien qu'elle "n'affirme pas suffisamment la dynamique de polarisation impérialiste qui a cours aujourd'hui, ni la dynamique vers la guerre impérialiste qu'elle contient" comme nous le disions dans une intervention à ce forum (cf. bulletin 25).

Ce que nous voulons relever dans ce présent article du Prolétaire, ce sont essentiellement deux choses:

1 – les camarades nous font la critique d'être idéalistes ;

2 – ils font le constat que cette erreur découle, selon eux, de notre application de la "grille d'analyse […] du CCI".

Avant d'en venir à la question de l'idéalisme (le nôtre ou plutôt, selon nous, celui des camarades du PCI) nous voulons relever que les camarades font le constat objectif que notre fraction se situe sur les bases politiques fondamentales du CCI.

Qu'ils le disent sous forme de critique et nous l'imputent à charge et presque comme une "tare" est ici secondaire dans la mesure où nous entendons bien continuer d'expliquer et démontrer en quoi, justement, ce "corpus politique" que la direction actuelle du CCI jette à l'eau est celui qui, parmi les groupes issus de la Gauche communiste, est le plus clair, le plus précis et le plus apte à armer les minorités révolutionnaires pour les combats de classe présents et à venir. Le débat et la confrontation des points de vue et analyses permettront de délimiter les forces ; ce débat et cette confrontation sont en cours et nous nous félicitons d'en être partie prenante.

Que les camarades nous donnent acte du fait que nous défendons ce corpus politique ne peut que nous réjouir (2).

Venons-en, donc, à la question de l'idéalisme.

Mais où est donc l'idéalisme ?

Partant de l'analyse selon laquelle "le prolétariat mondial n'a pas encore réussi à surmonter la contre-révolution qui l'a jeté pieds et poings liés dans les filets bourgeois." (Le Prolétaire n°473, p.8), les camarades du PCI en déduisent le jugement suivant à notre endroit :

"On ne peut refuser de prendre en compte cette réalité qu'en postulant une 'prise de conscience' souterraine du prolétariat, combattue par des offensives idéologiques bourgeoisies, bref en se détournant de l'analyse matérialiste des faits pour se réfugier dans les brouillards de l'idéalisme où tout devient possible."

Passons, pour le moment, sur l'appréciation des camarades à propos de la phase de "contre-révolution" dans laquelle nous nous trouverions et dont ils ne donnent pour illustration que la seule absence d'organisations de classe conséquentes (voir le même article). En dehors du fait que, quand ces organisations existent, qu'elles constituent une force sociale et politique réelle dans la classe, c'est qu'on est entré dans une période de montée révolutionnaire, il reste la question de savoir comment on passe de l'une à l'autre. Comment le prolétariat mondial passe de la contre-révolution à la situation dans laquelle il a "reconstitué ses organisations de classe" ?

A moins de "se réfugier dans les brouillards où tout devient possible", on ne peut se bercer de l'illusion que demain les prolétaires viendront en nombre demander à "une infime minorité à contre-courant" de lui donner des orientations, des directives.

Ce qui sous-tend, en fait, la critique que nous font les camarades, c'est l'idée qu'ils nous prêtent (aussi généreusement qu'indûment) et selon laquelle parler de "prise de conscience" au sein de la classe (et ici, peu importe qu'elle soit "sur" ou "souterraine") revient à dire que c'est cette prise de conscience, et donc cette conscience elle-même, qui serait l'élément moteur de l'histoire.

Une telle conception qui dit, en somme, que ce ne sont pas les luttes concrète des classes mais la lutte des idées qui est le moteur de l'histoire est effectivement une conception idéaliste. Et nulle part on ne peut trouver cette conception dans les textes publiés par la fraction, non plus que dans ceux du CCI (du moins jusqu'à ces dernières années (3) !

Par contre, une vision selon laquelle les idées que se font les hommes, la conscience qu'ils prennent de la réalité qui les entoure, les actions qu'ils entreprennent pour agir sur cette réalité, n'ont pas d'effet sur la réalité concrète et sur eux-mêmes, cette vision qui prétend tourner le dos radicalement à toute forme d'idéalisme, n'est que l'autre face de ce même idéalisme.

C'est ne pas prendre en compte les actions des hommes sur le réel et les effets de ces actions. Or, ces actions et leurs effets sur le réel sont fondés sur la conscience –précise ou confuse, juste ou déformée- que les hommes (ou plus précisément, les forces sociales) prennent de cette réalité. Elles sont une partie de la réalité. Ne pas tenir compte aussi de ces idées que se font les hommes, de cette conscience qu'ils se font de leur situation comme un aspect du réel, c'est réduire le réel à ses manifestations empiriques, c'est se baser, pour mener son action, sur une réalité tronquée, partielle, une idée de réel, une idée de classe. Et l'on tombe dans le piège que, justement on prétend éviter.

Telle nous semble être la démarche des camarades du PCI.

La Fraction


Notes:

1. Voir l'article Les nouvelles orientations du 16ème congrès de RI à l'œuvre à la Fête de LO.

2. Et il ne s'agit pas à ce niveau que le PCI se prononce sur les "querelles internes" au sein du CCI ; ce qui est une toute autre affaire.

3. Quand ça commence à être le cas avec la mise en avant de la décomposition comme explication exclusive de l'histoire, notre fraction réagit, et très fortement.


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