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LENINE SUR LA SCISSION ENTRE BOLCHEVIKS ET MENCHEVIKS

"La dernière brochure que nous reproduisons ici fut publiée à Genève pendant l'été 1905. Il s'agit de Deux tactiques de la social démocratie dans la révolution démocratique. On y trouve exposées, systématiquement cette fois, les divergences tactiques fondamentales d'avec les mencheviks. Les résolutions du « Ill° Congrès du P.O.S.D.R. » (bolchevique) tenu à Londres au printemps et de la conférence menchevique de Genève avaient totalement consacré ces désaccords pour aboutir à une divergence fondamentale dans l'appréciation de notre révolution bourgeoise dans son ensemble du point de vue des tâches du prolétariat.

Lorsqu'on jette un regard d'ensemble sur la lutte des deux tendances dans le marxisme et dans la social démocratie russes au cours de ces douze années (1895 1907), on ne peut manquer de conclure que le « marxisme légal », « l'économisme » et le « menchevisme » sont des manifestations diverses d'une seule et même tendance historique. Le « marxisme légal » de M. Strouvé (1894) et de ses semblables constituait le reflet du marxisme dans la littérature bourgeoise. L'« économisme », en tant qu'orientation particulière du travail de la social démocratie en 1897 et au cours des années suivantes, réalisa en fait le programme du « Credo» libéral bourgeois : aux ouvriers la lutte économique, aux libéraux la lutte politique. Quant au menchevisme, ce n’est pas seulement un courant littéraire, ce n'est pas seulement une orientation de l'activité de la social démocratie, mais une fraction unie qui mena pendant la prepériode de la révolution russe (1905 1907) une politique distincte tendant en fait à subordonner le prolétariat au libéralisme bourgeois.

Dans tous les pays capitalistes, le prolétariat est inévitablement relié à son voisin de droite, la petite bourgeoisie, par des milliers de degrés transitoires. Dans tous les partis ouvriers, il ne peut manquer de se former une aile plus ou moins nettement dessinée qui, dans ses conceptions, dans sa tactique, dans sa « ligne » d'organisation, représente les tendances de l'opportunisme petit bourgeois. Dans un pays aussi petit bourgeois que la Russie, à l'époque de la révolution bourgeoise, à l'époque des premiers débuts du jeune parti ouvrier social-démocrate, ces tendances ne pouvaient pas ne pas se manifester de façon bien plus forte, plus nette, plus frappante que partout ailleurs en Europe. Prendre connaissance des différentes formes sous lesquelles cette tendance est apparue dans la social-démocratie russe au cours des diverses périodes de son développement, c'est là chose nécessaire pour renforcer le marxisme révolutionnaire, pour tremper la classe ouvrière russe dans sa lutte émancipatrice."

(Préface au recueil En douze ans, septembre 1907, souligné par nous).

"La scission entre les bolcheviks et les mencheviks au sein du POSDR en général, et leur lutte acharnée au congrès de Londres en particulier soulèvent dans la presse bourgeoise des ricanements méchants qui sont devenus monnaie courante. Personne ne songe à chercher le pourquoi des divergences, à analyser les deux tendances, à informer le public qui lit sur l'histoire de la scission et sur tout ce qui caractérise le différend entre bolcheviks et mencheviks. (...).

Tout n'est pas positif dans cette lutte, c'est indéniable. Les scissions font beaucoup de mal à la cause du socialisme, cela ne fait pas de doute. Et cependant nous ne voudrions échanger pour une minute votre «léger» mensonge contre cette pénible vérité. La grave maladie de notre parti, c'est la maladie de croissance d'un parti de masse. Car il ne peut y avoir de parti de masse, de parti de classe, si l'on ne fait pas toute la lumière sur les nuances fondamentales, s'il n'y a pas lutte ouverte entre les différentes tendances, si l'on n'informe pas les masses de la ligne que suit tel militant ou tel organisation du parti. Sans cela, on ne peut constituer un parti digne de ce nom, et c'est un tel parti que nous sommes en train de forger. Nous avons obtenu que les conceptions de nos deux tendances apparaissent aux yeux de tous avec honnêteté, clarté et précision. Les altercations personnelles, les chamailleries et querelles de fraction, les scandales et les scissions, tout cela est de peu d'importance au regard des leçons que les masses prolétariennes tirent effectivement de l'expérience des deux tactiques, des leçons qu'en retirent effectivement tous ceux qui sont capables d'avoir une attitude politique consciente. Nos querelles et nos scissions tomberont dans l'oubli. Nos principes tactiques, aiguisés et trempés, entreront dans l'histoire du mouvement ouvrier et du socialisme en Russie comme autant de pierres angulaires. Les années passeront, voire les décennies et l'influence de l'une ou l'autre tendance se fera sentir sur des centaines de questions pratiques de tous ordres. La classe ouvrière de Russie et le peuple tout entier savent à quoi s'en tenir sur le bolchevisme et le menchevisme."

(Et les juges, que sont-ils ?, 5 nov.1907, les italiques sont de Lénine, nous soulignons).

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