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La classe ouvrière n'a plus besoin de ce CCI-là

L'intervention du CCI en Espagne à l'occasion de la mobilisation autour de la lutte des mineurs des Asturies, a brillé par son absence dans un premier temps – à l'exception notable du noyau en... Turquie. Puis, sous la pression des événements et l'écho de la « Marche noire » sur Madrid d'une part et l'étonnement, feint ou affirmé de sympathisants – cf. les mails de lecteurs sur leur site -, le CCI en Espagne a daigné produire un tract ... le 16 juillet ! – aujourd'hui reproduit tel quel dans toutes les langues.

Mais quel tract ! Quelle honte ! D'abord ce texte fait tout pour réduire et enfermer la mobilisation ouvrière sur le terrain des.. « indignés » et de la démocratie : « Nous, L’INMENSE MAJORITÉ, exploitée et opprimée, mais aussi indignée, nous travailleurs du public et du privé, chômeurs, étudiants, retraités, émigrés..., nous nous posons beaucoup de questions sur tout ce qui se passe. Nous devons tous, collectivement, partager ces questionnements dans les rues, sur les places, sur les lieux de travail, pour que tous ensemble commençions à trouver des réponses, à donner une riposte massiveforte et soutenue. »

Quelle organisation d'avant-garde que celle qui appelle à ne se poser que des questions alors que la lutte est engagée ! Cela nous rappelle « l'interrogation » de la section allemande du CCI dans un tract qui remettait en cause l'arme de la grève... au moment même où les ouvriers d'Opel à Bochum s'étaient lancés dans une grève sauvage (Le CCI liquidationniste et la lutte des ouvriers d'Opel, bulletin n°29 de la Fraction interne du CCI, décembre 2004).

À aucun moment, le CCI n'appelle l'ensemble de la classe ouvrière à rejoindre les mineurs et à transformer la « Marche noire » organisée par les syndicats en une véritable manifestation ouvrière marquant l'extension du combat à tous et son unification. À aucun moment, le CCI n'appelle au combat politique contre les manœuvres syndicales, mais au contraire à réfléchir (sic!), à se « regrouper dans les lieux de travail, dans les quartiers, par Internet, dans des collectifs pour réfléchir sur tout ce qui se passe, pour organiser des réunions et des débats, qui impulsent et préparent les luttes » alors même que le mouvement engagé par les mineurs devient, surtout quand les ouvriers de Madrid (et d'ailleurs) se joignent à lui, une bataille importante et même décisive pour la classe.

Pire même, le tract finit en appelant à ce que chacun « se change soi-même » comme condition indispensable au développement de la lutte : « Tout changement social est indissociable d’un changement individuel. Notre lutte ne peut pas se limiter à un simple changement de structures politiques et économiques, c’est un changement de système social et par conséquent de notre propre vie, de notre manière de voir les choses, de nos aspirations. Seulement ainsi [ici c'est nous qui soulignons], nous développerons la force pour résister aux pièges innombrables qu’on nous met sur le chemin, aux coups physiques et moraux qu’on risque de recevoir. Un changement de mentalité qui aille vers la solidarité, vers la conscience collective, lesquelles sont plus que le ciment de notre union, mais aussi le pilier d’une société future libérée de ce monde de concurrence féroce et de mercantilisme extrême qui caractérise le capitalisme ».

Ce discours est purement et simplement celui du « mouvement des indignés » et plus généralement celui de l'idéologie bourgeoise : « pour changer le monde, il faut se changer soi-même ». Mais surtout, ce discours est profondément anti-marxiste faisant de la concience de classe une somme de pensées, de réflexions personnelles et au mieux de consciences individuelles. La dérive opportuniste du CCI a amené ce dernier à se situer complètement sur le terrain de l'idéologie bourgeoise. S'il n'a pas encore franchi, politiquement, la frontière de classe, il n'est, semble-t-il, plus sur le terrain du marxisme et de la Gauche communiste et ne pourra donc pas résister aux soubresauts de l'histoire du fait de son terrible affaiblissement théorique et son adhésion aux thèmes les plus grossiers de l'idéologie bourgeoise.


Août 2012.


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