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Présentation de l'article du Prolétaire dénonçant le CCINous publions ci-dessous des extraits d'un article du PCI paru dans le journal Le Prolétaire n°486 d'octobre/novembre 2007. Dans cet article, les camarades se prononcent sur les mouvements sociaux qui ont agité le Venezuela depuis le printemps et jusqu'à la fin de l'automne de l'année 2007. Nous partageons globalement l'analyse faite par cette organisation, non seulement sur la nature bourgeoise de l'actuel gouvernement Chavez et de sa "révolution bolivarienne" mais aussi sur la nature petite-bourgeoise des mouvements de protestations qui ont agité le pays à l'initiative, principalement, du secteur étudiant. Ce que nous voulons relever et saluer ici, c'est la critique politique qui est faite vis-à-vis de la prise de position du CCI sur le même sujet (*). Le fait qu'un groupe politique indiscutablement ancré dans les principes et traditions de la Gauche communiste (**) engage cette critique est déjà un pas en avant notable. La critique est, au demeurant, très sévère sur le fond mais parfaitement correcte dans sa forme, autre point positif. Mais, ce qui nous paraît le plus positif, c'est que l'axe même de la critique porte sur un thème que notre fraction juge crucial aujourd'hui : la question de la dérive opportuniste du CCI. Le mot n'est pas dit dans l'article du Prolétaire mais toute la démonstration en arrive à la conclusion, au constat qu'aujourd'hui le CCI se positionne de façon opportuniste sur cette question (comme sur bien d'autres, d'ailleurs !). Nous ne pouvons que saluer ce travail du PCI et l'encourager à le poursuivre pour la bonne raison que cette clarification est une nécessité absolue pour la classe ouvrière et ses avant-gardes, aujourd'hui dispersées et éparpillées. Les camarades du Prolétaire contribuent, selon la formule de Marx, à rendre la honte plus honteuse en la livrant à la publicité. C'est une des fonctions des minorités communistes de dénoncer les dérives et les errements de groupes se proclamant communistes, c'est une de leurs fonctions de combattre les influences de l'idéologie bourgeoise sur les minorités communistes. À la critique des camarades du Prolétaire nous ajouterons, quant à nous, que la position du CCI actuel sur la situation au Venezuela est dans la droite ligne ("droite", si l'on peut dire en la circonstance !) des positionnements de cette organisation et que la même dérive s'est déjà manifestée, notamment, à propos des luttes contre le CPE, en France, au cours de l'année 2006(***). C'est la persistance et l'enfoncement dans cette logique qui traduit la présence du poison opportuniste dans l'organisme CCI. Pour notre fraction, nous le répétons, le fait que le PCI-Le Prolétaire engage le combat contre les manifestations de l'opportunisme dans le CCI est une chose dont nous nous réjouissons. Nous sommes, et entendons rester, partie prenante de ce combat. Et pour nous, le combat consiste à repousser les effets de l'idéologie bourgeoise sur les minorités communistes pour préserver ces minorités. Et pas à condamner le "malade" atteint de la "maladie" opportuniste. La Fraction Notes:
(*) Article paru dans Accion Proletaria n°196, en anglais et espagnol sur le site internet du CCI : internationalism.org. Nous notons au passage qu'un nombre croissant d'articles et de prises de position de cette organisation ne sont plus publiés que sur le Net et non sous forme imprimée. Autant dire que le souci de l'intervention directe dans la classes ouvrière n'est plus, pour eux, qu'une "vieille lune" ! !
(**) Le caractère prolétarien de cette organisation a toujours été reconnu par le CCI, au-delà des désaccords parfois profonds qui existent entre le courant "bordiguiste" et celui dont nous nous revendiquons. Sur ce plan notre fraction se situe aussi dans la continuité du CCI d'origine. (***) Lors de ces mouvements, le CCI "officiel" avait déjà manifesté de graves glissements opportunistes à propos de la violence de classe, du démocratisme. Voir les critiques que nous en faisions dans les bulletins n°35, 36 et 37, par exemple.
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Au printemps le gouvernement Chavez décida de ne pas renouveler la licence d'une chaîne de télévision d'opposition, la RCTV ; propriété d'une importante famille bourgeois vénézuélienne, la RCTV, à la différence du réseau appartenant au magnat Cisneros (1) n'avait pas cessé de s'opposer au gouvernement et de relayer les positions anti-chavistes de l'administration américaine.
Cette décision eut des conséquences que n'avaient pas prévues les autorités vénézuéliennes.
Au niveau international, sa condamnation par le gouvernement américain au nom de la "liberté d'opinion" fut relayée non seulement par des organisations comme Reporters sans Frontières (qui reçoit des financements de l'impérialisme US via sa tristement célèbre officine National Endowment for Democracy) ou Amnesty International, non seulement par de nombreux médias (y compris dits "de gauche" comme Libération en France), mais aussi par les députés européens ou brésiliens (accusés par Chavez d'être des "laquais de l'impérialisme yankee", ce qui provoqua une mini-crise diplomatique avec le Brésil).
Dans le pays, la décision contre la RCTV le 27 mai provoqua dès le lendemain des manifestations étudiantes de protestation qui s'étendirent à tout le pays. Lancé au départ par les étudiants des universités privées (catholiques) et autonomes les plus prestigieuses avec le soutien de leurs professeurs et dirigeants, le mouvement allait durer jusqu'à l'été. Outre la défense de l'autonomie des universités, il était centré sur les revendications démocratiques typiques de ce genre de mouvement petit-bourgeois : contre la "polarisation", pour la liberté d'expression, la réconciliation nationale, le bien de la patrie, la démocratie, la paix (un des symboles du mouvement était les mains blanches). Placée entre les deux classes opposées dont le conflit menace de la broyer -la bourgeoisie et le prolétariat- la petite-bourgeoisie aspire à la paix sociale, à la réconciliation des intérêts de classe antagoniques au nom de l'"intérêt général", de l'intérêt suprême de la nation qui serait commun à tous. "Il ne faudrait pas partager cette conception bornée que la petite-bourgeoisie a pour principe de vouloir faire triompher un intérêt égoïste de classe, écrit Marx dans Le Dix-huit brumaire de Louis Bonaparte". Elle croît au contraire que les conditions particulières de sa libération sont les conditions générales en dehors desquelles la société moderne ne peut être sauvée et la lutte de classes évitée". En se mobilisant pour la défense de la RCTV et la démocratie, les étudiants affirmaient vouloir "sauver le Vénézuela" tout en précisant ne pas faire de politique : "Nous ne sommes pas des socialistes, nous sommes des êtres sociaux ; nous ne sommes pas des néo-libéraux, nous sommes des êtres libres ; nous ne faisons pas d'oppositions, nous faisons des propositions !", etc.
Avec la survenue des vacances le mouvement finit par s'éteindre de lui-même alors que le gouvernement avait réagi en dénonçant une opération organisée par "l'impérialisme américain" et en appelant au soutien de ses partisans et des prolétaires. Si les masses ne se sont guère mobilisées, les différents courants d'extrême gauche ont accouru soutenir Chavez. D'un point de vue prolétarien il n'y avait aucune raison de soutenir le gouvernement et encore moins l'opposition de droite : il fallait défendre les positions indépendante de classe. Cela n'a pas été la position du CCI qui n'a pas hésité à "saluer et soutenir" le mouvement étudiant, avec des arguments à faire dresser les cheveux sur la tête.
Selon cette organisation : "Le mouvement va plus loin que l'opposition à un gouvernement, il contient les germes d'une remise en question du système capitaliste d'exploitation, se plaçant ainsi de façon indiscutable dans la lutte de salariés, de la classe ouvrière. En raison des moyens et des méthodes qu'il s'est donné pour la lutte (assemblées, élections de délégués responsables devant celles-ci, appel au débat en dehors des universités, etc.), propres au prolétariat quand il lutte sur le terrain de la défense de ses intérêts, il existe dans ce mouvement, quoique bien sûr de façon minoritaire et inconsciente, des tendances qui expriment les intérêts des salariés, qui le poussent en avant." (2)
Le lecteur notera que, pour le CCI, ce sont uniquement les méthodes - et évidemment les méthodes démocratiques !- qui font de ce mouvement un mouvement de la classe ouvrière ! C'est là une avancée théorique qui ouvre sans aucun doute de nouveaux horizons : par exemple, les assemblées d'actionnaires ne s'inscriraient-elles pas, de manière inconsciente bien sûr, dans la lutte de la classe ouvrière ?
Le CCI essaye d'expliquer pourquoi ce mouvement se place selon lui dans la lutte de la classe ouvrière. Il affirme d'abord péremptoirement que "la majorité [des étudiants] appartient à des familles prolétariennes ou paupérisée par la crise" ; en réalité au Vénézuela comme ailleurs, et particulièrement dans les établissements privés, les enfants de prolétaires ne sont qu'une insignifiante minorité. Mais l'essentiel est que : "une bonne partie de ces jeunes qui protestent aujourd'hui dans la rue ont été les témoins des ravages causés dans leurs familles et dans la société par la polarisation politique par les dirigeants chavistes et de l'opposition dans leur lutte pour le pouvoir. Ils ont été victimes de la division de la société [!] et d'un affaiblissement des liens de solidarité [?] ; beaucoup d'entre eux et leurs parents ont été pris dans les filets de la polarisation politique jusqu'à devenir fanatiques d'une fraction ou d'une autre, en perdant toute perspective".
Sans doute le CCI est-il bien obligé de parler des "dangers" pour le mouvement des étudiants représentés par les illusions démocratiques (comme si les orientations démocratiques ne constituaient pas le fond même du mouvement) et par la "proximité" de celui-ci avec l'opposition de droite (comme si celui-ci n'avait pas représenté un appui inespéré pour cette dernière) ; mais ce ne sont que des réserves mentales qui ne l'empêchent pas de s'enthousiasmer : "Le mouvement des étudiants que nous saluons et que nous soutenons a eu le grand mérite d'essayer de rompre avec le cercle vicieux et néfaste de la polarisation, en proposant le dialogue au travers d'assemblées où on décide de quoi on discute et dans quelles conditions [Ah, voter pour décider pourquoi et sur quoi voter !]. C'est un gain pour les étudiants eux-mêmes, pour les salariés et pour la société dans son ensemble [!], étant donné que cela renforce les véritables liens de solidarité sociale [?]. (...) Ce mouvement aura de véritables fruits si les facteurs prolétariens qui existent en son sein réussissent à le rapprocher non seulement des quartiers populaires, mais sutout des salariés des usines et entreprises du privé et du public. Ce rapprochement ne doit pas être recherché au moyen des syndicats et des partis politiques, mais au moyen des assemblées où seraient invités les travailleurs de tous les secteurs et les chômeurs. Ainsi les travailleurs pourraient percevoir la veine prolétarienne qui existe dans le mouvement, ce qui impulserait à son tour la réflexion et, pourquoi pas, la lutte des travailleurs (...)".
Il ne s'agit pas ici d'un simple alignement sans principe sur un mouvement démocratique petit-bourgeois, mais bien d'une profession de foi petite-bourgeoise : qui d'autres que des petits-bourgeois peuvent en effet gémir sur le "fanatisme", la "polarisation politique" et surtout la "division de la société" ? La société capitaliste est une société divisée en classes et n'en déplaise aux petits-bourgeois qui redoutent d'en être les victimes, cette division ne peut être niée ou surmontée par des bavardages démocratiques. Elle doit au contraire être reconnue et proclamée pour que les prolétaires puissent en tirer toutes les conséquences, c'est-à-dire pour qu'une polarisation politique effective, de classe, fondée sur la polarisation sociale fondamentale puisse avoir lieu.
Prétendant qu'"aujourd'hui le Vénézuela est à tous", le réformisme chaviste s'efforce de faire obstacle à cette polarisation en faisant croire aux prolétaires que leurs ennemis ne sont qu'une petite minorité de privilégiés soutenus par l'impérialisme américain.
Les prolétaires doivent sans aucun doute sortir de l'impasse fatale que représente ce réformisme chaviste, mais certainement pas pour entamer "le dialogue et le débat sur les principaux problèmes sociaux qui frappent la société" (a) (dialoguer avec qui, d'ailleurs ?) !
Ce dont ils ont besoin, ce n'est pas d'aller (qui plus est, non pas de manière organisée, mais individuellement) dans les assemblées étudiantes discuter des problèmes des petits-bourgeois, ni à l'inverse de courir prêter main-forte au gouvernement ; mais de s'organiser entre eux pour la lutte, pour la défense de leurs seuls intérêts de classe contre les capitalistes et leur Etat, même repeints en rouge, que protège le chavisme.
A la fausse alternative chavisme/antichavisme comme aux rêves brumeux de dialogue social et de renforcement de "la société dans son ensemble" (donc : toutes classes confondues), les prolétaires seront inévitablement poussés à répondre en prenant le chemin de l'affrontement réel : classe contre classe. Et ils verront que, ce jour-là, les petits-bourgeois démocrates et pacifistes et leurs représentants politiques seront aussi inévitablement de l'autre côté de la barricade. (...)
Le Prolétaire n°486
Notes (du PCI):
(a) Ces principaux problèmes sociaux sont, selon cet article : "le chômage, l'insécurité, etc." L'exploitation capitaliste des prolétaires et les moyens de lutter contre elle doivent sans doute se cacher dans cet "etc" ! Blague à part, les étudiants entendent discuter de leurs problèmes, d'emploi et autres, et évidemment pas de ceux des prolétaires.
(1) La RCTV, la chaîne de télé la plus populaire, appartient à Marcel Granier, apparenté à Cisneros (le monde capitaliste vénézuélien est petit ! Mais, paraît-il, les deux hommes ne se parlent plus). Granier accuse Cisneros de soutenir la fermeture de la RCTV parce que cela bénéficiera à sa propre chaîne, Venevision, qui en est la principale concurrente. Cf. "El Nuevo Herald", 8/7/2007.
(2) Cf. "Accion Proletaria" n° 196, juillet-septembre 2007 ou, en anglais et espagnol sur le site internet du CCI : internationalism.org.
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