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Nous publions ci-après des extraits du rapport d'activités que notre fraction vient de discuter et d'adopter. Nous renvoyons nos lecteurs sur la présentation qui en est faite dans l'introduction de ce bulletin. Bien évidemment, dans l'absolu, c'est-à-dire sans notre exclusion en mars 2002, ce rapport aurait dû être mis en discussion au sein même du CCI et soumis au vote de ses militants. Selon ses propres règles organisationnelles, et selon la tradition du mouvement ouvrier, nous aurions dû participer aux travaux du 16e congrès, nous aurions dû pouvoir discuter et combattre aussi le rapport d'activités présentés par la majorité opportuniste de notre organisation. C'est la vie même de notre organisation qui s'en trouve atteinte et l'absence de débats et de la confrontation politique des deux lignes opposées et irréconciliables, celle opportuniste et droitière des liquidationnistes et celle marxiste représentant la gauche incarnée par notre fraction, qui auraient dû avoir lieu en son sein et face à l'ensemble du prolétariat, affaiblissent encore plus le CCI lui-même et y facilitent le travail destructeur de la liquidation. Nul doute que notre présence en son sein et notre combat permanent contre les dérives et révisions politiques et théoriques auraient rencontré un écho encore plus grand et servi de point d'appui à une résistance accrue, et organisée, à l'opportunisme et à la liquidation du CCI.
Pour notre part, et afin de contrecarrer au maximum de nos possibilités cet affaiblissement et cet assèchement de la vie politique d'une partie importante du camp prolétarien, nous menons notre combat ouvertement, publiquement, et engageons toutes les forces communistes à y participer. C'est aussi dans cet esprit et avec ce souci que nous publions ce rapport qui est autant un bilan d'activités de notre fraction qu'un bilan de la dérive politique de notre organisation.
[...] Nous pouvons dire que continuité et combat politiques sont deux caractéristiques essentielles de notre fraction. [Et cela...] signifie que tout bilan de nos activités ne peut se faire qu'en rapport à l'évolution (et au bilan) de notre organisation, à savoir le CCI. Les trois premiers rapports [de notre fraction 1] sont essentiellement un bilan critique des activités et des orientations politiques du CCI. Et ce n'est qu'à partir de ces bilans que notre fraction proposait des orientations alternatives à l'orientation opportuniste du liquidationnisme. Même si nous ne sommes plus formellement dans le CCI, et donc sommes coupés de la vie quotidienne de notre organisation, le bilan de la fraction qui suit ne peut être aussi qu'un bilan du CCI et ne peut s'évaluer que sur ce dernier
Mais d'abord, rappelons-nous quelles étaient les principales orientations que voulait mettre en avant notre fraction dès son origine :
"Face à cette situation, notre Fraction reprend à son compte l'Adresse du collectif (2) et se propose de :
- combattre la dérive "révisionniste" actuelle qui ne s'exprime pas seulement sur le plan du fonctionnement, mais aussi sur le plan théorico-politique ;
- développer la réflexion théorique, notamment par un travail approfondi sur l'histoire du mouvement ouvrier, afin d'amener l'organisation à se réapproprier ses propres fondements, ceux du marxisme révolutionnaire, dont s'écarte de plus en plus la politique qui est menée actuellement ;
- remettre l'analyse de la situation internationale au premier plan des discussions et notamment lutter contre une tendance "démoralisatrice" qui tend à marquer notre compréhension de la situation et du rapport de force entre les classes, et cela en vue de renforcer notre intervention dans la classe ouvrière ;
- pousser l'organisation à ne se concevoir que comme une partie du MPP [Milieu politique prolétarien] et donc à développer une politique unitaire, plus courageuse et plus déterminée en direction de celui-ci." (Déclaration de formation d'une fraction interne, bulletin n°1, 9 octobre 2001).
A la simple lecture des ces orientations, il apparaît évident que non seulement elles ont été mises en pratique et réalisées - il suffit de jeter un oeil aux sommaires de nos bulletins - , mais de plus qu'elles restent encore aujourd'hui au coeur même de notre activité. Il appartiendra donc à la discussion non seulement de tirer un bilan critique de cette réalisation incontestable (aucun d'entre nous ne pourra, nous semble-t-il, défendre qu'elles n'ont pas été mises en place et développées) mais aussi de les réaffirmer ou bien, ce que ce rapport ne défendra pas, d'en définir de nouvelles [...].
Avant le 15e congrès du CCI en 2003, nous estimions "que, malgré sa dérive opportuniste, le CCI n'a pas encore trahi le camp prolétarien" (présentation du bulletin 13). Est-ce encore valable ? Nous devons répondre explicitement à cette question car elle définit "la phase de "fraction interne" ou de "lutte pour le redressement de l'organisation", [qui] loin d'être une "étiquette organisationnelle", loin d'être un "jeu tactique" avec l'actuel CCI, correspond et impose, nous impose, une méthode et des orientations d'action et de réflexion bien précises et bien délimitées" (idem).
Il nous faut donc reprendre l'évolution politique réelle du CCI et notre combat de fraction. Nous allons le faire depuis le printemps 2003. Cette date correspond à la fois à des échéances organisationnelles (notre précédent rapport et le 15e congrès du CCI) et à des événements historiques importants (la guerre en Irak et les luttes ouvrières massives en France mai-juin 2003). Si la dynamique opportuniste du CCI est le facteur qui détermine le combat de notre fraction, il convient de souligner qu'un des axes principaux de ce combat, voire même le principal, est l'intervention politique de notre fraction vis-à-vis des autres groupes du camp prolétarien, en premier lieu du BIPR, que nous allons aussi intégrer à ce bilan général.
Le rejet de l'alternative historique "guerre ou révolution"
Le premier événement d'importance - nous allons les prendre par ordre chronologique - est la révision par le CCI d'un des principes du marxisme et du mouvement ouvrier : l'alternative historique guerre ou révolution. Certes, cette révision n'a été connue qu'après la guerre en Irak et les grèves ouvrières du printemps 2003 en France. Mais l'introduction de cette révision, comme le soulignent d'ailleurs les liquidateurs eux-mêmes, est antérieure à ces événements. De plus, elle est d'importance historique et marque un pas important dans la dérive opportuniste. En fait, cette résolution "fonde" en grande partie les différentes révisions opportunistes qui se sont manifestées dans les mois suivants.
"La crise économique (...) continue à s'approfondir, mais contrairement à la période de 1968 à 1989, alors que l'issue de ces contradictions de classe ne pouvait être que la guerre ou la révolution, la nouvelle période ouvre la voie à une troisième possibilité : la destruction de l'humanité, non au travers d'une guerre apocalyptique, mais au travers d'une avance graduelle de la décomposition (...). La décomposition (...) pourrait à terme saper la capacité du prolétariat à répondre comme classe (...). Dans le nouveau scénario, la classe ouvrière pourrait être battue d'une manière plus ou moins ouverte et moins directe, simplement en n'arrivant pas à répondre à la crise du système et en se laissant de plus en plus entraîner dans la spirale de la décadence". (Résolution du 15e congrès du CCI, Revue internationale 113, souligné par nous).
Notre fraction a réagi presque immédiatement à cette révision d'une position fondamentale du marxisme dans le bulletin 21. Elle n'a pas arrêté depuis, à chaque fois que possible, de dénoncer cette prise de position et d'appeler d'une part les militants du CCI, soit individuellement lors des rencontres (RP à Paris par exemple), soit dans des articles divers (Sur le 16e congrès de RI, Adresse à Rivoluzione..., cf. bulletins 25, 27), à prendre conscience et à lutter contre cette révision et d'autre part, à interpeller et inviter l'ensemble des groupes et éléments du camp prolétarien à réagir. Si nous pouvons affirmer que nous avons su, globalement, assumer pleinement notre rôle de fraction et de défense d'un principe central du mouvement ouvrier face à sa trahison, il convient aussi de constater que ce n'est que récemment, c'est-à-dire tardivement que le BIPR (et Le Prolétaire ? Si oui, encore plus timidement) ont manifesté leur connaissance de cette position et sa gravité pour, sinon la dénoncer, au moins la mentionner ici ou là (dans leur presse un peu, dans les discussions individuelles). Nous savons que notre dénonciation a eu un impact au sein même du CCI [et] qu'elle a provoqué de forts remous et un fort malaise politiques : il est apparu ouvertement, et apparaît encore ouvertement, dans la presse territoriale du CCI (RZIZ bien sûr mais pas uniquement) dans des tournures de phrases qui s'essaient à concilier les "deux positions" et en faisant silence sur la dénonciation et... dans la réaction furieuse et... politiquement impuissante de la liquidation (cf. par exemple la note de l'article Les racines marxistes de la décomposition, Revue internationale 117) essayant de nous disqualifier comme militants sans répondre à la question politique.
Peut-on dire que notre dénonciation a été, et reste un frein, à l'imposition complète de cette révision au sein même du CCI ? Qu'elle a un impact immédiat, réel, concret y inclus au sein de notre organisation ? Poser la question, si elle est valable alors elle se pose sur tous les plans, a son importance car il s'agit de voir si le combat de notre fraction a aussi un impact positif au sein même de notre organisation en freinant la dérive opportuniste. L'hétérogénéité de la presse, les embarras et contradictions manifestes, la réponse rageuse de la liquidation qui esquive honteusement la question politique, montrent que non seulement notre combat a eu des effets positifs mais en plus qu'il peut permettre, qu'il peut servir de point d'appui, il ne faut pas en douter, à une opposition interne, à une réaction de classe de surgir au sein du CCI. Affirmer cela ne veut pas dire que cette réaction réussira à se développer au-delà d'une résistance passive et dispersée.
Et bien évidemment, notre dénonciation et notre combat sur ce plan ont attiré l'attention de tout le camp prolétarien, groupes et individus, donc y inclus les sympathisants et militants du CCI, qui était certainement, dans sa grande majorité, dans l'ignorance de cette révision, soit n'en voyait pas toute la signification politique. Néanmoins, sur ce plan, le camp prolétarien ne s'investit pas vraiment, en tout cas pas au niveau nécessaire. Pour le moins, il sous-estime ce combat. Cela ne doit pas nous décourager d'autant que cette lutte contre l'opportunisme actuel du CCI ne fait que commencer dans la mesure où celui-ci, de toute évidence, va accentuer ses attaques contre l'ensemble du camp prolétarien, et en particulier va essayer d'enrayer et de détruire la dynamique actuelle de discussions, de débats, de confrontation ouverte des positions politiques, bref la dynamique de regroupement comme l'a prouvé la violence de ses attaques devant le fiasco - fiasco du point de vue prolétarien, du point de vue du regroupement international des révolutionnaires, grande victoire du point de vue du liquidationnisme du CCI actuel - de son intervention en Argentine vis-à-vis du NCI (3).
La résolution ne se contente pas de réviser explicitement une position de toujours du marxisme. Elle sanctifie la même dynamique à la révision et au rejet de principes marxistes tels que la lutte des classes et l'impérialisme.
"Dans le nouveau scénario, la classe ouvrière pourrait être battue d'une manière plus ou moins ouverte et moins directe, simplement en n'arrivant pas à répondre à la crise du système et en se laissant de plus en plus entraîner dans la spirale de la décadence (...).La classe ouvrière dans cette période a été confrontée non seulement à ses faiblesses politiques, mais aussi au danger de perdre son identité de classe sous le poids d'un système social en pleine désintégration" (point 15)" affirme la résolution du 15e congrès. D'autres passages de cette résolution introduisent la même tendance à l'abandon du principe central du marxisme, à savoir que "la lutte des classes est le moteur de l'histoire". Notre critique de la résolution souligne aussi ce point d'autant qu'elle, notre critique, fait suite aux grèves du printemps 2003, c'est-à-dire à l'intervention défaitiste du CCI et à l'intervention décidée de notre fraction sur la base des positions et de l'expérience militante du CCI. Dans la mesure où cette question s'exprime plus en terme de tendance qu'en terme de révision ouvertement revendiquée, ce point dénoncé alors s'est retrouvé par la suite au centre de notre combat dans la réalité concrète des luttes ouvrières.
"L'abandon de ces institutions [ONU et OTAN] de "droit international" représente une avancée significative du chaos dans les rapports internationaux (point 8). (...) Dans la période de la décomposition capitaliste, le mouvement vers la formation de nouveaux blocs est constamment contrarié par la contre-tendance de chaque pays à défendre ses intérêts nationaux immédiats avant tout, par la tendance au chacun pour soi. Les profondes divisions entre pays européens sur la guerre en Irak ont montré que "l'Europe" est loin de former un bloc cohérent comme certains éléments du mouvement révolutionnaire ont tendance à l'affirmer". Ce point est aussi dénoncé dans notre critique. Ce rejet de la notion d'impérialisme constitue même depuis le début même de notre fraction, depuis le 11 septembre 2001 et les attentats aux Etats-Unis, la première question "non organisationnelle" sur laquelle nous avons mené une bataille ouverte dans notre bulletin (cf. bulletin 5 et 6) et lors de notre dernière participation à une réunion du CCI, le BI plénier de janvier 2002. Sur cette question aussi, notre intervention a eu un impact dans le camp prolétarien en encourageant le débat et la clarification politique (cf. les prises de position du BIPR et celles, en partie critiques du Prolétaire) aussi bien que dans le CCI (encore une fois cela s'est ouvertement manifesté dans RZIZ mais aussi dans les prises de position contradictoires de la presse du CCI).
Derrière tous ces remises en cause, se trouve la question de la "Décomposition" comme vision globale (et même globalisante) de la situation du capitalisme qui est une vision pour le moins idéaliste, tournant le dos de plus en plus ouvertement au marxisme et se manifestant par des analyses et des interventions opportunistes. En particulier, elle rompt avec la notion de décadence. Nous avons donc dû défendre la problématique et la question à laquelle le CCI avait essayé de répondre à l'époque à la situation historique inédite ouverte avec la fin du bloc impérialiste de l'Est et de l'URSS en concordance, dans le cadre même de la décadence.
Le contenu politique du tract du 20 mars 2003 que le CCI distribue, plutôt est censé distribuer, lors de l'éclatement de la guerre en Irak, dénonce correctement la guerre impérialiste et défend tout à fait correctement que seule la lutte de la classe ouvrière peut s'opposer à la guerre impérialiste et mettre fin au capitalisme. Certes, à aucun moment, il ne met en avant le fait que l'opposition de la France et de l'Allemagne constitue la mise en place d'un pôle impérialiste alternatif et donc marque une dynamique bourgeoise affirmée vers la guerre impérialiste généralisée. La position développée tend donc à sous-estimer la gravité et la signification de la guerre, et surtout de l'affrontement entre les principales puissances impérialistes. La guerre en Irak est pour le CCI un moment du développement du chacun pour-soi et du chaos impérialistes.
Le tract dénonce aussi le pacifisme. Certes, là -aussi relativement correctement, disons en soi. Mais la prise de position est en deçà de la situation et la dénonciation est atemporelle. Cependant, c'est sans doute sur le pacifisme réduit à de simples illusions que le manque de conviction et d'engagement militant s'exprime le plus :
"Ces illusions ne peuvent que désarmer toute opposition réelle au cours à la guerre que le capitalisme porte en lui-même de façon inéluctable. Pire encore, elles préparent l'embrigadement dans la guerre : puisqu'il peut exister un "bon" capitalisme "pacifique" et "respectueux des intérêts du peuple", alors il faut prendre les armes quand il est menacé par le "mauvais" capitalisme "belliciste" et "antidémocratique". Et c'est pourquoi ces illusions sont délibérément encouragées par toutes les forces politiques de la classe dominante et avant tout par les partis de la soi-disant "gauche", des sociaux-démocrates aux trotskistes" (Contre la guerre impérialiste ! Contre les illusions pacifistes ! Pour la lutte de classe dans tous les pays !, tract du CCI du 20 mars 2003).
Néanmoins, le contenu du tract est globalement juste au point que nous nous disposons à le distribuer (et qu'un de nos militants le distribue sur son lieu de travail). Devant le refus du CCI (cf. bulletin 18), nous avons diffusé notre propre tract et celui du BIPR.
Mais si la dérive opportuniste du CCI ne se manifeste pas particulièrement dans le contenu politique du tract du CCI, elle s'exprime par contre de manière éclatante dans la plus que timide mobilisation des militants du CCI pour les manifestations (Paris 22 mars et surtout le 3 avril, à Mexico) et dans le fait que le tract... n'est pas diffusé massivement (au point qu'à Paris le liquidateur en chef Peter - le fait s'est répété d'ailleurs en d'autres occasions -, seul militant mobilisé pour l'occasion malgré des préavis de grève pour cette journée d'action syndicale dans tous les secteurs de la fonction publique, ne distribue pas le tract à la manifestation du 3 avril sur les retraites alors qu'il en a plein dans un sac de sport et alors que nous lui proposons de l'aider... cf. bulletin 19). C'est particulièrement au niveau militant et organisationnel que l'opportunisme, en l'occurrence sous la forme de la désertion du combat politique, s'exprime.
"La fraction est intervenue :
- lors de la manifestation à Paris du 18/01/2003 contre la guerre, et en l’absence d’une intervention des groupes de la Gauche communiste par voie de tract, notre Fraction a décidé de faire entendre la voix internationaliste. Nous y avons diffusé environ 500 exemplaires d’un tract élaboré à partir de l’article Une nouvelle période s’ouvre paru dans notre Bulletin 14 ;
- avec le BIPR (Bilan et Perspectives), le 15 février, la Fraction a distribué 1200 exemplaires de ce même tract et a contribué à la diffusion de 2000 tracts du BIPR ;
- le 22 mars, la Fraction a distribué son tract, légèrement actualisé, à plus de 2000 exemplaires.
- au Mexique dans plusieurs manifestations et sur les lieux de travail, où nous avons distribué le tract du BIPR ainsi que notre propre tract.
La Fraction a proposé au BIPR, au PCI et au CCI d’aider à la diffusion de tout tract internationaliste, avec lequel elle serait en accord, et produit par ces derniers groupes. Elle a également appelé tous les militants internationalistes isolés à se joindre à ces groupes politiques pour faire entendre le plus fortement possible la voix prolétarienne." (bulletin 18).
Le tract du BIPR met en avant toute une série de réactions prolétariennes, certes limitées mais non moins réelles, contre le déclenchement de la guerre. Ces réactions seront par la suite complètement ignorées du CCI. Pour notre part, nous les reprenons dans ce bulletin 18 et nous en citons quelques autres en Belgique et en France.
Néanmoins, ce n'est pas autour de cet événement que la dérive opportuniste du CCI se manifeste le plus ouvertement, en tout cas qu'elle apparaît comme telle aux yeux de la majorité des éléments du camp prolétarien (rappelons de plus que la résolution du 15e congrès n'est pas encore adoptée, et encore moins connue). Mais la rupture politique et militante que constitue le liquidationnisme avec le CCI de toujours va s'affirmer de manière tranchée et éclatante dans les deux mois qui suivent lors des grèves françaises de mai-juin 2003.
Nous n'allons pas revenir dans ce rapport sur cette expérience de luttes, sur "l'analyse" de notre organisation d'origine et son intervention ouvertement de jaune, ouvertement défaitiste, quand elle a eu lieu ; ni sur notre propre intervention active, dynamique (tant vis-à-vis de la classe que vis-à-vis du camp prolétarien comme un tout) ; ni non plus sur tout le combat politique qui a suivi contre la liquidation de l'expérience militante du CCI, en particulier des années 1970-1980, contre la falsification de l'intervention du CCI lors des grèves de 1995. Nous sommes sûrs que les camarades ont encore en mémoire l'essentiel de ce qui s'est passé. A défaut, on peut évidemment se reporter aux bulletins (indiquer les références si publication externe).
Nous savons que notre intervention (tract dès la fin avril, tract-bilan à la fin du mouvement, communiqué et prises de position dans le bulletin sur les dynamiques du mouvement et sur notre intervention) a eu un écho important tant dans le CCI (c'est à sa suite que la liquidation nous interdit l'accès aux réunions publiques) et parmi ses militants, qu'au sein du camp prolétarien (groupes et individus). Ne pas revenir dessus en détail ne doit pas nous empêcher de souligner que nous avons alors joué à plein notre rôle de fraction interne en arrachant des mains mêmes du liquidationnisme le drapeau du CCI des années 1970-1980 au point que la résolution du 16e congrès de RI de 2004 a été obligée, c'était reconnaître la perte de la bannière, de "rejeter les schémas du passé" sur la lutte de classes. Notre intervention a aussi participé - difficile de dire dans quelle mesure mais le fait n'en est pas moins certain - des prises de position tout à fait correctes - même si un peu en retard dans le temps, même si avec des orientations assez générales - du BIPR et du Prolétaire. Et elle a attiré la sympathie, parfois active, de nombreux militants ou sympathisants isolés. C'est-à-dire qu'à la fois, nous avons combattu et défait en cette occasion la liquidation aux yeux de tous, que nous avons défendu les acquis et les positions du CCI véritable, et que nous avons réussi à entraîner autour de ces orientations générales et immédiates de lutte les autres composantes du camp prolétarien - ce que le CCI n'avait jamais réussi à faire jusqu'alors.
Les grèves "sauvages" des postiers britanniques et dans les transports urbains italiens, contre les directives syndicales et contre les interdictions légales de grève (préavis) et l'intervention du CCI en ces occasions viennent confirmer les tendances et les contradictions internes apparues lors du printemps. Elles viennent aussi confirmer notre analyse de la reprise internationale des luttes, la validité de nos orientations d'intervention, et la capacité du BIPR (surtout BC), et à un degré moindre le PCI, à se situer résolument dans le sens du combat ouvrier croissant : à partir de la reconnaissance d'une dynamique au renouveau des luttes ouvrières, appels concrets et réalisables à la lutte, à l'extension hors de la corporation, à l'organisation par les travailleurs eux-mêmes, et au combat contre les sabotages syndicaux.
Les contradictions internes du CCI apparaissent ouvertement dans le traitement divers, différent, hétérogène, des publications territoriales du CCI sur ces grèves. En particulier, RI et la Revue internationale ignorent superbement ces mouvements, puis finissent par reproduire de manière tronquée l'article de RZIZ qui saluait la lutte des tramways milanais comme manifestation de la reprise ouvrière. La grève des postiers britannique reste inconnue des lecteurs français du CCI durant de longs mois. De même, la reconnaissance par WR dès novembre 2003, par la publication d'un article reprenant le rapport sur la situation adopté par le BI plénier qui vient pourtant de se tenir, et qui annonce un "tournant" dans la dynamique de la lutte des classes, est passé aussi sous silence par la presse française. Ce n'est quasiment qu'au bout d'un an, que celle-ci reprend explicitement l'analyse d'un tournant dans la lutte de classes se gardant bien de parler de reprise... pour de toute évidence ne pas devoir s'aligner sur notre position. Profitons de l'occasion pour souligner en passant que cette dernière attitude particulière aux sectes politiques, prendre position dans un sens ou dans un autre en fonction et en opposition systématique des prises de position d'autres groupes politiques, était une des principales caractéristiques de ce que le CCI avait qualifié à l'époque, à tort ou à raison peu importe ici, de "parasitisme politique".
Mais l'hétérogénéité de la presse et l'existence d'une contre-tendance résistant au défaitisme officiel ne signifie pas qu'il y ait une dynamique affirmée contre la dérive opportuniste. Par exemple, la prise de position de WR sur la grève des postiers (cf. bulletin 23), tout comme d'Internationalism sur une autre grève aux USA, sont incapables d'avancer des orientations concrètes et réalisables de lutte, se limitant à appeler à "regagner l'auto-identité de classe", et en se retranchant derrière la mainmise et le contrôle final des syndicats sur ces mouvements pour en conclure à une remise en cause de la réalité de ce qu'ils appellent "le tournant". Le cadre de la décomposition revient alors vite en force pour tenter de donner une cohérence à tout cela, cohérence donnée par les manoeuvres réussies de la bourgeoisie contre la classe ouvrière et à l'impuissance de cette dernière. Pour RZIZ, et alors que les ouvriers des transports urbains sont en grève sauvage et que leur mouvement s'étend sur deux mois, contre les directives syndicales, "la classe ouvrière doit aujourd'hui se heurter de nouveau avec le vrai visage des syndicats pour commencer à les contester, pour commencer à rechercher une autonomie pour ses luttes".
C'est donc, même dans le meilleur des cas (RZIZ et WR), une incapacité et un abandon croissant de la nécessité pour la classe ouvrière d'assumer un combat politique contre les forces bourgeoises, syndicats et gauchistes en particulier, qui s'impose dans les prises de position du CCI. Et c'est surtout la fuite devant les responsabilités politiques et militantes concrètes, réelles, dynamiques, "dirigeantes", face à la lutte de classes cette fois, qui s'exprime ici et confirme l'indécision et la fuite devant le combat politique de classe en général.
Il est intéressant de nous arrêter justement à ce moment de notre bilan chronologique. Car il convient de noter que globalement, les points de dérive politique opportuniste apparues jusqu'alors, et que nous venons de résumer et de rassembler, marquent des "trahisons" théoriques et politiques par rapport aux positions et principes communistes. D'une certaine manière, pour un lecteur, un sympathisant, ou bien encore un militant politique, y compris du CCI lui-même, non attentif, sans rigueur théorique et politique, voire sans expérience, ces éléments, notre critique et dénonciation, peuvent apparaître comme des chicaneries abstraites de "spécialistes", voire être complètement ignorés sans en voir l'importance et les conséquences politiques dramatiques qu'elles contiennent.
Mais cette dynamique comporte nécessairement un autre volet, qui peut être second dans le temps, mais qui est les implications politiques concrètes de ces trahisons "théoriques" : les prises de position concrètes et l'intervention militante vis-à-vis de la situation, face aux événements de la lutte des classes. Et là malheureusement, les résultats sont déjà catastrophiques du point de vue prolétarien. Sur toutes les questions d'importance, les positions adoptées par le CCI des liquidationnistes ont rejoint et ont défendu ouvertement l'idéologie bourgeoise :
- il s'est positionné ouvertement et publiquement contre les grèves (France 2003 et Allemagne 2004) au cours même de celles-ci ;
- il s'est positionné ouvertement et publiquement au côté de la bourgeoisie dans ses appels à la "solidarité humaine" lors des catastrophes en tous genres qui rythment la vie du capitalisme (attentats, tsunamis, etc...) ;
- il se positionne chaque fois plus dans le même sens que la bourgeoisie sur l'impossibilité d'une guerre impérialiste généralisée, au sens d'une 3e guerre mondiale entre grandes puissances (4), et en légitimant l'intervention des Etats-Unis contre ces manifestations de "chaos" par ses arguments empruntés à la bourgeoisie et par ses avertissements permanents et redoublés contre le supposé chaos international ;
- de manière croissante, il reprend à son compte l'idéologie et la morale bourgeoise en appelant à "l'indignation révolutionnaire", en reprenant les concepts du bien et du mal, en parlant de chaos et d'irrationalité à tout propos et en toute occasion (surtout quand la réalité dément ses dogmes sur la décomposition).
Dès 2003, les prises de position du CCI actuel face à l'accélération de l'histoire, le surgissement d'événements concrets interpellant directement le prolétariat international et les révolutionnaires, sont venues concrétiser de manière catastrophique au plan politique et organisationnel, cette dérive qui pouvait encore apparaître jusqu'alors comme "abstraite", comme sans conséquence politique concrète.
C'est à partir de ce moment, suite à la guerre en Irak et aux grèves françaises, que commence à apparaître clairement deux dynamiques opposées au sein du camp prolétarien : d'un côté le BIPR, le PCI, notre fraction et un certain nombre de sympathisants du camp prolétarien qui tendent et réussissent à se situer sans équivoque dans le sens des intérêts historiques du prolétariat sur chaque événement particulier, "du bon côté de la barricade", et de l'autre le CCI liquidationniste qui apparaît de plus en plus comme le fer de lance, la pointe avancée, des positions opportunistes, petites-bourgeoises et bourgeoises, au sein du prolétariat, se positionnant presque systématiquement du mauvais côté de la barricade, c'est-à-dire bien souvent avec les mêmes arguments, voire les mêmes positions, que les médias bourgeois et les campagnes idéologiques. Ce même clivage s'est déjà affirmé et va maintenant s'accentuer sur la question cruciale, centrale, du regroupement des forces communistes. Notre intervention et notre mise en évidence de ce clivage, de ces deux dynamiques, a été essentielle pour poser clairement, ouvertement, les termes du combat contre l'opportunisme actuel (…).
[...Au sein de notre fraction, lors des grèves du printemps 2003 en France...], il y a eu un réel effort collectif au prix de discussions intenses, pour le moins à Paris, pour à la fois reprendre et s'appuyer sur l'expérience et les acquis du CCI tout en se libérant d'éventuels schémas tout faits. En particulier, nous avons été capables de comprendre les spécificités de ce mouvement, sa dynamique particulière, tout en s'appuyant sur les expériences passées (1986, 1995 en particulier). Pour synthétiser grossièrement, nous avons su reconnaître que la dynamique de développement de la lutte ne s'inversait pas après l'échec de l'extension au plan national au lendemain du 13 mai (contrairement à la dynamique de 1986 par exemple), mais cherchait d'autres voies au moyen des liens géographiques dans les quartiers et villes tissés par les "assemblées" de différents ordres et autres délégations massives, au moyen de la dispute de la direction des manifestations de rue aux syndicats, etc... (cf. nos bulletins 19, 20 et 22).
L'année 2003 marque donc un moment bien particulier, une étape, dans l'accélération de la dérive politique et organisationnelle - c'est après la réunion publique de juin 2003 sur les grèves que nous sommes définitivement interdits de ces réunions - du CCI et dans la cristallisation des forces politiques en présence. C'est à ce moment que notre fraction commence à s'imposer comme la continuité du véritable CCI. Et c'est aussi à ce moment que le BIPR entame une intervention décidée envers notre fraction et nous reconnaît comme la continuité du CCI : "Ainsi votre document apparaît très différent du notre, celui d'octobre 2002, que nous considérons comme encore valable et utilisons dans les manifestations où nous pouvons aller (...). Nous ne savons pas si le CCI est aujourd'hui moribond (c'est ce qui semble) mais nous regrettons de voir que la Fraction Interne reprenne presque parfaitement l'ancien rôle et positions du vieux CCI" (Lettre du BIPR à la fraction sur notre tract diffusé lors des manifestations pacifistes contre la guerre en Irak, bulletin 19, juin 2003). Cette appréciation ne va pas empêcher le BIPR de poursuivre et de développer son intervention vis-à-vis de notre fraction. A cette occasion, nous avons la capacité de "rebondir", de saisir la balle au bond, pour répondre au BIPR, La conception marxiste de l'histoire dans ce numéro du bulletin, et de reprendre et de défendre la conception marxiste... du CCI. Par la suite, dans les numéros suivants, nous reprenons et développons la conception du CCI sur la décadence, la série d'articles La décadence du capitalisme et le marxisme. C'est-à-dire que s'engage alors publiquement un combat politique, face à l'ensemble du camp prolétarien qui reconnaît maintenant la réalité de cette lutte politique, visant à défendre les acquis et l'expérience du CCI face à leur liquidation.
Suite aux grèves françaises, il est évident que le CCI est traversé par des contradictions internes. Il est tout aussi évident que notre intervention a provoqué des doutes et un trouble au sein de notre organisation. Notre interdiction d'assister aux réunions publiques en est une expression. Durant l'été, la presse s'essaie à justifier son défaitisme lors des grèves en s'appuyant de manière schématique sur les grèves de décembre 1995 en en dénaturant la réalité et surtout la réalité de l'intervention du CCI alors. Nous sommes donc amenés à revenir sur cette expérience et à défendre à la fois l'analyse et notre intervention face aux incompréhensions du camp prolétarien (par exemple dans les réunions de lecteur du PCI, dans le bulletin), mais aussi contre les falsifications du nouveau CCI. Cette lutte et la signification de notre combat de fraction prend toute son ampleur quand RI est amené d'une part à dénoncer la grève de l'été 2003 des intermittents du spectacle qui en faisant grève "sont poussés à scier la branche sur laquelle ils sont assis : à chaque fois qu'un spectacle ou un festival est annulé, c'est une occasion perdue de décrocher un contrat, et un pas certain vers le chômage pour la majeure partie d'entre eux" (RI 338, sept. 2003) ; et d'autre part à "défendre", ou plutôt à essayer de justifier son intervention dans les grèves du printemps, en reconnaissant que ses militants, les rares qui sont intervenus (Lyon et Nantes), ont appelé à la reprise du travail dès le 22 mai au plus fort des grèves et du mouvement.
Au même moment, et de manière parallèle et complémentaire, la politique sectaire du CCI qui s'exprime encore essentiellement, en tout cas publiquement, que vis-à-vis de notre fraction nous oblige à reprendre et défendre toute l'expérience du CCI en matière de regroupement, de discussion et de débat au sein du camp prolétarien, La liquidation du combat pour le regroupement des révolutionnaires dans les bulletins 23 et 24.
Dix jours après les attentats de Madrid, le 21 mars, nous publions une prise de position les situant dans la continuité de la situation ouverte le 11 septembre 2001, comme un moment particulier de la marche à la guerre entamée par les bourgeoisies des grandes puissances impérialistes tant au niveau des rivalités impérialistes immédiates qu'au niveau de l'imposition à la classe ouvrière d'une idéologie pacifiste et nationaliste au nom de "la guerre contre le terrorisme". Dans le même sens, le BIPR, trois jours après nous, le 24, défend que "le terrorisme est une arme de la guerre bourgeoise. Face à la marche du capitalisme vers la guerre et la barbarie, la seule force qui puisse freiner ce cours est la classe ouvrière".
Cet événement vient fournir un nouveau moment dans la dérive opportuniste du CCI (cf. notre bulletin 24). Le CCI aussi dénonce les attentats comme "un acte de guerre". Mais le cadre de compréhension des événements est tout autre et les implications politiques aussi. D'une part, est réaffirmé avec force (RI) le règne du "chacun pour –soi" en lieu et place de la dynamique à la polarisation impérialiste et donc l'impossibilité absolue d'une marche vers une guerre mondiale généralisée. De son côté, WR tend à laisser la porte ouverte à cette possibilité. Néanmoins, de manière totalement empirique [...], le CCI est obligé de reconnaître qu'il existe un "tandem" franco-allemand.
Mais c'est surtout vis-à-vis du terrorisme que la dérive opportuniste est marquée. "Indépendamment de savoir quelle puissance impérialiste ou fraction de la bourgeoisie tire profit des actions terroristes, celles-ci tendent toujours plus à échapper aux plans tracés par ceux qui ont donné naissance. (...) Comme l'apprenti sorcier, la «créature» tend à devenir incontrôlable" (RI 345). Cette vision d'un terrorisme devenu incontrôlable était déjà apparue suite aux attentats du 11 septembre aux USA où le CCI avait présenté Ben Laden comme "devenu incontrôlable par ses anciens maîtres" américains. Elle a des conséquences politiques extrêmement négatives et dangereuses : si on suit le CCI liquidationniste, le terrorisme ne serait plus un moment des affrontements impérialistes entre grandes puissances.
De même, les attentats aux USA avait initié les saluts à la "solidarité humaine". Madrid est l'occasion d'en remettre une couche en saluant la solidarité de ceux qui ont de suite donné leur sang dans les hôpitaux. Amalgamant ces "dons" du sang comme expression de "ce sentiment de solidarité" avec "le développement de la solidarité dont est porteuse la classe ouvrière", le CCI des liquidationnistes défend que "les révolutionnaires et l'ensemble du prolétariat mondial doivent clamer, haut et fort, leur solidarité avec les victimes".
Depuis lors, c'est sur tous les plans déjà cités que le CCI s'enfonce dans l 'opportunisme, la révision de ses positions classiques et l'abandon du marxisme. Conséquence directe de l'abandon de l'alternative historique "guerre ou révolution" au profit d'une "troisième voie", RM n'hésite pas à déclarer que des pays comme Haïti sont perdus pour la révolution. Ou bien encore, conséquence directe du dogmatisme aveugle et sourd, que la bourgeoisie mexicaine soutient la bourgeoisie américaine au moment de la guerre en Irak alors même qu'elle s'y oppose ouvertement, en particulier en votant à l'ONU contre l'intervention militaire américaine.
Mais surtout, l'intervention de la section en Allemagne au moment de la grève sauvage à Opel, octobre 2004, à Bochum marque la concrétisation dans l'intervention immédiate du révisionnisme crasse qui s'empare du CCI. Le tract distribué est une véritable liquidation de la grève comme arme essentielle de la classe ouvrière. Ce qui était annoncé dans la résolution du 15e congrès international, l'abandon du principe marxiste de la lutte des classes, est confirmé et entériné par l'intervention de la section allemande (cf. bulletin 29). S'interrogeant sur la grève comme moyen de lutte pour la classe ouvrière aujourd'hui, alors même que toute la bourgeoisie dénonce la grève et appelle les ouvriers de Bochum à reprendre le travail au plus vite, syndicat en tête, le CCI déclare que "dans de telles situations, la grève en tant que moyen d'intimidation de l'adversaire perd beaucoup de son efficacité (...). La grève perd une bonne partie de son pouvoir de menace". C'est évidemment catastrophique pour notre organisation, pour la crédibilité du CCI historique et de toute la Gauche communiste. Après le printemps 2003 en France, c'est un véritable travail de jaune, un soutien direct à la bourgeoisie, à ses syndicats qui sont ouvertement contre la grève et la sabote, qui est accompli de nouveau de manière immédiate. Et une fois encore, le CCI se retrouve du même côté de la barricade que la bourgeoisie dans un événement particulier, mais important, de la vie du capitalisme. Non seulement, le CCI désarme la classe ouvrière en lui retirant l'arme de la grève, mais en plus il justifie la non participation à celle-ci.
Autre moment fort de la dérive et de "l'irrationalité" de la pensée nouvelle du CCI, l'analyse de la réélection de G. Bush. Celle-ci est comprise comme un affaiblissement de la bourgeoisie américaine et la domination de l'irrationnel et de l'obscurantisme sur le processus électoral américain (5). De nouveau, notre organisation désarme le prolétariat international en rejetant de fait la véritable signification de la réélection de Bush : la confirmation de la volonté impérialiste agressive et offensive, vers la guerre généralisée, de la bourgeoisie américaine (cf. notre bulletin 30).
Nous pourrions multiplier les faits de ce genre. En particulier ceux où le CCI actuel reprend à son compte les arguments mêmes de la bourgeoisie et où il présente des analyses "inversées" de la situation qui présentent la bourgeoisie comme très affaiblie alors même qu'elle sort renforcée de tel ou tel événement comme la réélection de Bush ou bien encore le résultat et les implications politiques française et surtout internationale des référendums français et néerlandais. Au lieu d'armer le prolétariat face aux dangers réels, la lutte de classe résolue menée par la bourgeoisie, qui le menace, le nouveau CCI le "tranquillise", le rassure et le désarme !
Parallèlement à cette dérive au plan politique et théorique, la dérive au plan organisationnel s'est aussi poursuivie : service d'ordre aux réunions publiques, violences physiques, dissolution de la réunion publique quand le rapport de forces physiques n'est pas en leur faveur, provocations à l'égard de nos militants, à l'égard du BIPR aussi (Naples), refus de nous vendre la presse, utilisation des sympathisants, polémiques grossières et haineuse vis-à-vis des autres groupes, sabotage délibéré de la réunion publique du BIPR à Paris le 2 octobre 2004, etc... attaques scandaleuses contre les autres groupes, et surtout destruction des nouveaux éléments surgissant en Argentine ; et absence croissante de mobilisation des militants, manque de conviction militante, adhésions sans principe, inepties politiques proférées lors des rencontres, sectarisme exacerbé, vide de l'intervention lors de la Fête de LO encore dernièrement, etc...
Il convient ici de faire un aparté sur les déclamations triomphaliste présentées régulièrement dans la presse du CCI sur les nouvelles intégrations. Les nouveaux éléments que le CCI a intégrés, ou est en voie d'intégrer (France, Espagne, Allemagne...), souvent aux liens familiaux étroits, sont visiblement intégrés sur une base opportuniste (tant sur le plan organisationnel - l'histoire des organisations révolutionnaires est l'histoire de la lutte contre le clanisme - que politique -la décomposition). En particulier, ces nouveaux camarades semblent particulièrement affectés par le sectarisme et le refus de la confrontation politique ouverte et frontale des différentes positions politiques - sans parler de leur "anti-parasitisme" aveugle. C'est dire qu'ils sont intégrés sur d'autres principes que ceux du véritable CCI. C'est dans ce sens que nous avons rapproché leur intégration de la vague d'intégration de nouveaux militants lors de la bolchévisation des PC dans les années 1920, la fameuse "Promotion Lénine". Tout comme dans les PC d'alors, ces intégrations présentées comme des manifestations de succès de l'opportunisme visent à masquer les faillites politiques aux yeux des militants et sympathisants. Nous savons que nombre de militants du CCI d'aujourd'hui essaient de se consoler des dérives et des abandons politiques par, ou de se les cacher et de les oublier par, le fait et l'argument "qu'il y a des jeunes et des nouveaux". Typique du centrisme honteux et du renoncement militant...
Néanmoins, existe une résistance sourde, dispersée, presque "souterraine", en partie inconscience, en partie "honteuse", que la liquidation ne peut faire disparaître du jour au lendemain. L'expression la plus "régulière" de résistance, non déclarée, mais néanmoins réelle, est celle de Rivoluzione. Nous avons signalé l'hétérogénéité de la presse territoriale du CCI. Mais elle semble souvent le fruit plus de vieux réflexes que d'une volonté politique consciente. Les camarades italiens sont les seuls à exprimer de manière constante, soulignée par nous et donc au moins en partie consciente, d'une résistance politique à l'opportunisme. Nous avons eu raison de saisir cette opportunité pour, de manière fraternelle, tendre une perche aux camarades même si c'était sans illusion aucune sur un quelconque résultat immédiat. Mais nous devons continuer cette politique : à savoir dénoncer fermement, durement, sans concession, les expressions de l'opportunisme ouvert et déclaré, et d'autre part saisir toutes les expressions de résistance, qui ne peuvent être que centristes, pour attirer l'attention et des camarades en question et de l'ensemble du camp prolétarien sur le fait que... le CCI n'est pas encore mort pour le prolétariat.
Il s'agit donc ici, à ce point du rapport, d'affirmer que le CCI n'est pas mort pour le prolétariat et qu'il existe encore un combat pour le redressement de cette organisation. Bien évidemment, le fait qu'il utilise et reprend de plus en plus des "arguments" bourgeois, voire qu'il fournit des arguments tel le chaos ouvrant la porte au soutien des USA par exemple, pour développer ses "analyses" opportunistes l'entraîne inexorablement vers le camp adverse. Mais malgré cela, il continue à présenter des positions - certes inconséquentes - internationalistes et communistes sur les questions essentielles auxquelles est confronté le prolétariat. Ce n'est donc pas en déclarant prématurément sa mort que nous pouvons combattre son influence néfaste et défendre ses acquis et son expérience historique, mais bel et bien en luttant contre la dérive opportuniste face à la classe ouvrière et face au camp prolétarien dans son ensemble. Il s'agit donc bien d'un combat de fraction dont il s'agit et qui reste à l'ordre du jour.
L'expérience de ces trois dernières années au cours desquelles nous avons réaffirmé cette orientation de lutte de notre fraction contre l'opportunisme, vient confirmer au plus haut point que cette orientation est complémentaire avec celle visant au regroupement des forces communistes telles qu'elles se présentent aujourd'hui. Loin de nous éloigner de ces forces, et du principal pôle de regroupement que représente le BIPR, c'est dans ce combat contre la liquidation et pour la défense du véritable CCI que nous avons participé activement, directement, et au premier plan, au renforcement politique et organisationnel de ce pôle. La liquidation du CCI ne s'y est pas trompée : depuis septembre 2004 et la rupture du NCI argentin avec elle, et surtout depuis la volonté de ce dernier de se rapprocher du BIPR, c'est un véritable travail de destruction et d'attaques en règle et systématique qu'elle a développé comme jamais. Il s'agit de son orientation d'activités et de son souci politique principaux (6).
Cette dynamique accentuée et redoublée est à la fois la réaction du liquidationnisme au développement de la dynamique de regroupement international autour du BIPR et sa reconnaissance de sa perte de contrôle de la situation, de son échec définitif à venir. Elle a échoué à faire disparaître notre fraction. Elle a échoué à nous faire renoncer au CCI, à ses positions et ses acquis. Elle a échoué à empêcher notre rapprochement fraternel autour du BIPR et au débat avec ce dernier des positions classiques du CCI. Elle a échoué à détourner le BIPR de notre fraction et de son rôle actif de pôle de regroupement international. Bref, elle a perdu la main et n'a plus rien à offrir aux nouveaux éléments qui surgissent. C'est exactement ce que vient montrer l'expérience des camarades argentins (cf. bulletin 28 et 29).
Depuis le printemps 2003, les relations de notre fraction avec le BIPR, et à un niveau nettement moindre avec le PCI-Le Prolétaire car essentiellement avec ses militants, se sont développées au plus haut point. Jamais le CCI n'avait réussi à développer de telles relations d'intervention, de discussion, de travail, et de confiance avec les camarades du BIPR, avec l'organisation politique. Loin de nous décourager devant ce qui pouvait sembler comme parfois un désintérêt de la part du Bureau, et qui n'était sans doute qu'une étude sérieuse et patiente de sa part, nous avons continué inlassablement à développer nos liens avec lui (courrier, invitations, débats, diffusion des tracts, reproduction d'articles et de tracts, expression de solidarité lors des attaques du CCI liquidationniste comme celle à Naples, collaborations techniques telles traductions et diffusion de la presse, etc...). Mais c'est surtout notre, la leur et la notre, capacité et volonté de développer un véritable débat sur les questions de fond, théoriques, en divergence entre le CCI et le PCI, qui ont permis de développer les relations et le rapprochement politique en cours. Conséquents avec les positions classiques du CCI, et avec la reconnaissance que le BIPR était devenu le seul pôle de regroupement international, malgré les divergences et faiblesses politiques que nous y trouvons, nous avons poussé et aidé à ce qu'il développe son intervention aussi bien en France et au Mexique, là où la fraction est présente, comme internationalement. S'il n'avait pas besoin de nous pour développer son intervention en Allemagne auprès du GIS, par contre notre soutien et notre participation active à l'intervention en Argentine est une concrétisation particulière de cette politique.
Aujourd'hui, l'enjeu reste de convaincre le BIPR qu'il doit continuer à assumer une présence politique régulière en France, en particulier à Paris, et de participer de toutes nos forces au développement de son intervention en Amérique Latine, en particulier en Argentine.
L'autre enjeu est de mener à leur terme les discussions sur la décadence (en particulier réussir à savoir où sont "exactement" les divergences) et sur la question du parti.
Dans ce panorama positif, il faut néanmoins regretter une certaine passivité et difficulté du BIPR à assumer une présence politique en France d'une part, et à prendre toute sa part du combat contre l'opportunisme et le sectarisme destructeur du CCI. Sur ce plan donc comme sur les autres, nous devons continuer à montrer le chemin en assumant en première ligne ce combat.
Les perspectives de rapprochement politique avec le BIPR, au centre de notre orientation politique, quelle que soit l'évolution des divergences politiques et donc quel que soit le degré de rapprochement organisationnel final, et le développement de ce dernier au niveau international sont extrêmement enthousiasmantes et sont des jalons pour le futur parti.
Notre orientation politique de combat systématique contre le développement de l'opportunisme du CCI a permis de développer un niveau de relation avec le BIPR comme jamais auparavant le CCI lui-même et le BIPR n'avait réussi à le faire. Des circonstances historiques et "objectives" - diverses - ont favorisé cette dynamique. Mais c'est surtout le retour aux principes mêmes du CCI en matière de regroupement, et donc leur défense et réalisation concrète vis-à-vis de tous les groupes et éléments du camp prolétarien, sans exclusive et sans concession, qui ont alimenté cette démarche et l'ont permise. Il peut apparaître curieux pour ceux qui n'ont pas compris, ou ont tourné le dos aux conceptions du CCI en la matière, que ce soit justement dans la défense des acquis du CCI que ce rapprochement se soit le plus développé. Pour nous, il n'y a là rien d'étonnant.
Rien d'étonnant car l'opportunisme du CCI actuel, que nous avons qualifié de liquidationniste, ne se contente pas de liquider notre organisation. Il s'attaque et vise à détruire l'ensemble du camp prolétarien tant au niveau organisationnel - les attaques et provocations de tout ordre contre le BIPR et Le Prolétaire, la tentative d'élimination des camarades argentins du NCI... - qu'aux niveaux politique et principiel.
Comme ce rapport le met en évidence, il y a une aggravation considérable de la dérive opportuniste qui est passé en peu de temps du domaine des erreurs d'analyse générale (incompréhension de la période historique ouverte avec le 11 septembre, en particulier de la dynamique de bipolarisation impérialiste, incompréhension de la dynamique de reprise des luttes ouvrières...) au niveau des positions programmatiques du CCI (abandon de la décadence au profit de la "Décomposition" (7), abandon de la guerre impérialiste généralisée comme perspective du capitalisme, abandon de toute notion de cours historique déterminés par la lutte des classes). Puis, tout aussi rapidement, le CCI liquidationniste a commencé à rejeter des positions fondamentales du marxisme et du mouvement ouvrier telles que l'alternative historique "guerre ou révolution", ou encore la lutte des classes comme moteur de l'histoire. Et enfin, en un temps record si l'on considère que le capitalisme dans la période actuelle n'a pas encore imposé à la classe ouvrière et aux révolutionnaires de grands et dramatiques combats historiques, le CCI d'aujourd'hui se positionne de plus en plus systématiquement du côté bourgeois de la barricade sur chaque question (luttes, grèves, campagnes politiques et idéologiques de la bourgeoisie contre la classe ouvrière, guerre impérialiste...).
Et tout cela au nom du CCI, de sa tradition et du crédit politique et militant qu'il avait pu gagner durant plus de trois décennies. Et tout cela aussi au nom de la Gauche communiste, et en particulier de la Gauche italienne. Qu'on le veuille ou non, l'opportunisme d'aujourd'hui, son expression la plus dangereuse, à savoir le CCI des liquidateurs, qui est sans aucune mesure avec les autres expressions d'opportunisme de ces dernières années, s'attaque à l'ensemble des forces communistes existantes et leur impose un combat politique.
C'est cette nouvelle donne, cette nouvelle réalité "historique" de la Gauche communiste, en lien étroit avec la nouvelle situation historique ouverte en 2001, qui pousse au combat commun des forces dynamiques et communistes, à leur rapprochement, à leur regroupement et à la clarification des différentes positions.
Il est devenu clair pour tous, que la confrontation politique indispensable, nécessaire, avec les véritables positions du CCI, ne se fait pas avec le CCI "officiel" opportuniste mais avec notre fraction. Et la clarification politique des différentes positions se fait dans le combat de classe contre le capitalisme et sa dynamique actuelle et, à la fois, dans le combat contre l'opportunisme du CCI actuel, contre son influence destructrice dans le camp prolétarien, expression la plus haute et la plus dangereuse aujourd'hui de l'opportunisme.
Juin-juillet 2005
Notes:
1 Dès sa constitution en octobre 2001, notre fraction avait repris à son compte le rapport, rédigé (cf. bulletin n°1) et présenté au nom de la majorité de l'ancien Secrétariat International (SI) pour la réunion du BI (Bureau International, organe central du CCI) plénier de septembre 2001. Le deuxième rapport (cf. bulletin 6) a été présenté par notre fraction, en son nom, pour le BI plénier de janvier 2002 juste avant notre exclusion définitive en mars 2002. Et puis, il y en a eut un troisième qui a été réalisé en octobre 2002 pour le 15e congrès du CCI, alors que nous étions donc déjà exclus depuis plusieurs mois, et qui constitue la présentation du bulletin 13. Dans le bulletin 14 qui suivait, nous avons aussi reproduit la Résolution sur le travail de la fraction adoptée en mai 2002. Si on ajoute la Déclaration de constitution du Collectif , aout 2001, et la Déclaration de constitution de la fraction, octobre 2001 (cf. bulletin 1), nous avons un ensemble de textes qui jalonnent l'histoire de notre fraction et exprime la continuité de notre combat contre l'opportunisme.
2 Le Collectif est le premier regroupement minoritaire contre la politique liquidationniste au sein du CCI. Il se constitue au mois d'août 2001 (cf. Epilogue de l'Historique du SI, bulletin 25).
3 C'est exactement ce qu'annonce la résolution d'activités adoptées au 16e congrès international (Revue internationale 122, juillet 2005) : "La défense du NCI face aux attaques conjointes du «Círculo», de la «Ficci» et du BIPR montre la voie à tout le CCI pour le développement de l'organisation. (...) Dans la poursuite de cet effort, nous devons en particulier viser à : (...) intensifier notre offensive contre le parasitisme, non seulement contre la «Ficci», mais aussi contre des groupes ayant un impact international comme le GCI".
4 Quand nous avons rédigé ce rapport, la résolution sur la situation internationale du 16e congrès international nous était encore inconnue. L'affirmation de cette résolution (point 6) selon laquelle "la guerre mondiale ne constitue pas la menace concrète pour l'humanité qu'elle a été pendant la plus grande partie du 20e siècle" ne nous étonne donc pas.
5 "Le fait que le candidat de son choix [Kerry] n'ait pas été élu (...) constitue une expression de l'affaiblissement de la puissance américaine. (...) La classe dominante américaine est confrontée à des difficultés croissantes dans sa capacité à manipuler le cirque électoral. (...) L'irrationalité, produit de la peur et de l'impuissance, a dominé ces élections" (Internationalism 132, nov. 2004, RI 352, déc. 2004).
6 Cf. la résolution d'activités adoptée à ce congrès et qui est citée à la troisième note de ce rapport.
7 Cette liquidation de la position de toujours du CCI sur la décadence vient d'être officiellement annoncée et revendiquée par le 16e congrès du CCI qui vient de se tenir : "En tout cas, le cycle crise-guerre-reconstruction est terminé et la crise aujourd'hui, dans l'incapacité de déboucher sur la guerre mondiale, est le facteur primordial de la décomposition du système. Elle continue donc à pousser le système vers son autodestruction" (Résolution sur la situation internationale, point 14, Revue internationale 122). L'annonce, sans aucun argument et sans aucune discussion, de la fin d'un des fondements théoriques de la décadence, à savoir la reconnaissance du "cycle crise-guerre-reconstruction", marque la liquidation d'une des positions programmatiques du CCI.
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