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Quelles sont les conceptions fondamentales de Marx sur les rapports économiques et sociaux essentiels ? On a eu très souvent le tort de considérer l'œuvre de Marx sous deux aspects dans le temps : avant et après le “Manifeste Communiste” (1848).
Si, dans la réalité, il y a une profonde évolution de la thèse de Marx sur Épicure et Démocrite à ses dernières oeuvres se rattachant au "Capital" et à ses théories économiques, il n'en reste pas moins vrai qu'il y a une continuité presque absolue entre son œuvre philosophique et son œuvre économique. La méthode qui sert à Marx est la même, l'esprit dans lequel il l'entreprend et même les grandes idées maîtresses qui président à toute l’œuvre de sa vie, on peut dire que Marx les a eues avant 1848.
Si nous en croyons, en effet, les éditeurs allemands et français des Notes de Marx sur "Économie politique et Philosophie", ces Notes auraient été rédigées durant l’année 1844, de février à août.
Or, dans ces notes - qui n'ont été publiées qu'en 1931 - est contenue à l'état d'abstraction et de synthèse (dans le sens marxiste), toute la pensée de Marx qu'il ne fera que développer et étayer pendant le reste de sa vie ; et sa vie sera trop courte pour lui permettre de mettre le point final à œuvre gigantesque.
Jamais personne ne pourra mettre le point final à l'œuvre de Marx, car c'est le mouvement vers le socialisme qui pousse les communistes à étudier l'interaction des différents phénomènes de la société, dans tous les domaines de la connaissance humaine, et que ces domaines ne font que s'étendre à l’infini. Les prétentieux qui pensent terminer une œuvre alors que Marx, lui-même, n'a pu, génie et travailleur gigantesque, que tracer une large esquisse de la pensée socialiste, ne sont pas des marxistes et des révolutionnaires. Chacun contribue, dans la mesure de ses forces et de ses possibilités propres, à approfondir la pensée socialiste, contribuant ainsi à l'effort du prolétariat vers la révolution communiste.
On doit se repencher sur les enseignements du passé et essayer d’en tirer ce qui est encore valable, pour comprendre notre société actuelle. L'œuvre de Marx est pour cela inépuisable et on continuera, après la révolution à se pencher sur son œuvre et sa pensée.
Un problème central nous intéresse dès que nous voulons caractériser l'époque que nous vivons. Certains disent que la société actuelle, du moins dans certains pays, évolue vers le socialisme ; d’autres pensent que la société va vers la barbarie au travers de la venue au pouvoir d'une nouvelle classe sociale : la bureaucratie. Dans ces conditions, réexaminer les rapports de production et les rapports sociaux afin de démêler tout ce fatras idéologique était nécessaire. Rapports de production, rapports sociaux fondamentaux, caractères principaux de ces rapports, leur évolution historiques jusqu'à nos jours, cette étude doit nous permettre de mieux asseoir notre ligne de conduite dans le chaos formidable dans lequel la guerre capitaliste nous plonge.
Nous avons à. réexaminer l’ensemble de ces problèmes et confronter nos idées.
Marx a passé la majeure partie de sa vie et de son œuvre à tenter d'interpréter les caractéristiques fondamentales de la propriété privée capitaliste et de la différence entre les modes de productions antérieurs et le mode capitaliste de production. Ses conceptions fondamentales sur les rapports économiques et sociaux essentiels sont déjà contenus à l'état de schéma dans "Économie Politique et Philosophie". Le développement de ces idées maîtresses ne se trouvent que par la suite, dans les derniers tomes du "Capital", rédigés par Engels d'après des notes de Marx, mais que Marx lui-même n'a jamais eu le temps de présenter sous forme achevée. C'est donc d'après de simples notes jetées sur le papier par Marx, d'après les réflexions qu'il pouvait faire sur les différents problèmes que lui suscitaient ses études critiques sur l'économie politique, de Quesnay à Ricardo et de Ricardo à Robertus, et dont le plan du "Capital" fait partie, travail colossal entrepris par Marx et dont le premier tome du "Capital" est la seule partie achevée ; toutes ces notes contiennent, non pas un système économique et philosophique, non pas l’aboutissement et la fin d’une pensée, la pensée socialiste, mais bien au contraire n'en constituent qu'une étincelle devant déterminer un incendie, depuis un siècle le feu ne faisant, pour ainsi dire, que couver sous la cendre. Nous jugerons d'autant plus du pouvoir incendiaire de l'étincelle de la pensée marxiste de Marx quand nous projetterons la lumière de la critique de l'économie politique marxiste, opérée sur un capitalisme naissant, sur notre société capitaliste décadente. C'est seulement avec cette guerre de 1939-45, c'est-à-dire presque un demi-siècle après la naissance de la scission fondamentale entre la voie réformiste et la voie révolutionnaire dans le mouvement socialiste, que le courant révolutionnaire arrive à tirer les ultimes conséquences de la scission opérée dans le mouvement socialiste ; et, s'il peut en tirer ces conséquences, c'est avec la méthode marxiste et la plus grande partie des matériaux fournis par Marx lui-même sur l'étude des rapports sociaux et économiques fondamentaux du système capitaliste. Aujourd’hui, la scission entre les deux voies prises par des courants se réclamant du socialisme s'opère d’une façon quasi obligatoire ; si elle n'avait pas existé antérieurement il aurait fallu la créer, la conséquence ultime du courant réformiste étant entièrement réalisée dans les faits, c'est-à-dire dans le soutien et la perpétuation du régime capitaliste, alors que l'heure de sa fin a sonné depuis longtemps.
L'évolution du capitalisme libéral au capitalisme d'État d’une part, et d’autre part l'évolution du réformisme dans le mouvement ouvrier à la pratique politique du gouvernement capitaliste d'État par tous les courants politiques réformistes (y compris le trotskisme) sont les deux phénomènes parallèles qui ont conduit le courant révolutionnaire à tirer les ultimes conséquences du mouvement vers la révolution socialiste passant par le reversement violent de l'État capitaliste par le prolétariat.
Dans cette page de "Économie Politique et Philosophique", Marx fait d’abord une comparaison entre certains traits de caractères distinctifs des propriétaires fonciers et des capitalistes, des restes de la société antérieure et de sa médiocrité, et de sa nouvelle forme capitaliste qui se dresse, évolue et tend, dans son évolution, à bouleverser et à réduire toutes les formes antérieures de la société. Cette tendance du capitalisme le pousse jusqu'à acquérir la forme pure du capital, sans toutefois jamais y parvenir totalement de par les contradictions internes du système capitaliste, qui le poussent jusqu'à recréer un milieu retardataire par rapport à lui-même parce que c'est sa condition de vie.
Nous voulons commencer en citant cette page dans sa presque intégrité et, partant de là, rechercher, dans l'œuvre ultérieure de Marx, des formulations plus achevées.
"De la marche réelle du développement (…) suit la victoire nécessaire du capitaliste, c'est-à-dire de la propriété privée développée sur la demi-propriété non développée, du propriétaire foncier, comme doivent l'emporter en général le mouvement sur l'immobilité, la bassesse ouverte et consciente sur la bassesse dissimulée et inconsciente, la cupidité sur la soif de jouissance, l'égoïsme avoué incessant des esprits éclairés sur l'égoïsme local paresseux et fantaisiste de la superstition, l'argent sur l’autre forme de la propriété privée ;- mais sa victoire civilisée consiste à avoir découvert et crée, comme source de la richesse, le travail humain à la place de la chose morte."
"(…) La propriété foncière dans sa différence du capital est la propriété privée, le capital encore atteint de préjugés impolitiques locaux, pas encore dégagé de son enchevêtrement avec le monde, le capital encore inachevé. Il faut qu'au cours de son évolution il arrive à son expression abstraite, c'est-à-dire pure."
"(…) Le rapport de la propriété privée est le travail et le capital et leur relation réciproque. Le mouvement que ces membres ont à parcourir est : l'unité immédiate et médiatisée des deux.
Au début, le capital et le travail sont encore unis ; puis ils sont, il est vrai, séparés et aliénés, mais conditions positives réciproques de leur existence et de leur progrès.
Opposition des deux : le capitaliste et l'ouvrier s'excluent l'un l'autre et cherchent à se détruire mutuellement.
Opposition de chacun contre soi-même. Capital=travail accumulé=travail. Comme tels, ils se décomposent en soi-même et les intérêts, puis en intérêts et bénéfices. Disparition absolue du capitaliste. Il est incorporé à la classe ouvrière tout comme l'ouvrier- mais (...) purement exceptionnels – devient capitaliste. Travail en tant qu'élément du capital, ses frais. Donc le salaire victime du capital."
"Les ouvriers se décomposent en eux-mêmes et en salaires. L'ouvrier est lui-même un capital et une marchandise."
(Économie Politique et Philosophie - Œuvre phil Vl-p.124-5).
Dans ce schéma, Marx part des éléments propriété privée, capital, travail et de leurs différents rapports, pour arriver, à la fin, à déclarer la disparition du capitaliste en tant qu'élément du capital et sa réapparition comme simple salarié du capital. Dans le "Capital" également, Marx se sert d'abstractions, ce qui fait croire qu'à chaque fois qu'il parle de "capital", il sous-entend toujours "les capitalistes individuels."
En réalité, Marx montre comment le capital devient un élément de la production, indépendant chaque jour davantage des individualités capitalistes elles-mêmes.
Pour bien saisir l'ensemble de ces rapports :
"(…) LE RAPPORT DE LA PROPRIÉTÉ PRIVÉE EST LE TRAVAIL ET LE CAPITAL ET LEUR RELATION RÉCIPROQUE…"
Il est nécessaire de regarder plus attentivement la place qu'occupe, chez Marx, le capitalisme dans l’ensemble du procès historique :
"(…) Ce procès de production capitaliste est une forme historiquement déterminé du procès de production sociale. Ce dernier est à la fois procès de production de la vie humaine et un procès spécifique s'opérant dans des conditions matérielles de la vie humaine et un procès spécifique s'opérant dans des conditions de production historico-économiques, produisant et reproduisant ces conditions de production et par conséquent les représentants de ce procès, ses conditions matérielles et leurs relations, c'est-à-dire leur forme sociale et économique.
En effet, l'ensemble des relations qui existent entre les représentants de cette production et la nature constitue précisément la société considérée dans sa structure économique…" (Capital - Mol. XIV-112).
En somme, la manière dont les hommes se comportent vis-à-vis de la nature, en vue de dominer ses forces et ses éléments, et d’en tirer leur subsistance constitue "la société considérée dans sa structure économique."
C'est-à-dire qu'historiquement, la relation directe de l’homme à la nature constitue d'abord un appareil de production tellement simple que la structure économique est constituée simplement par le rapport direct de l'homme à la nature. L'homme s'approprie les produits naturels directement. Puis avec l'utilisation d'un outillage de plus en plus perfectionné, l'homme s'est constitué un rapport avec la nature qui devient un ensemble de rapports d'une société organisée, avec ses rapports de propriété, ses rapports juridiques, familiaux etc.
"(…) l'ensemble des relations (…) entre les représentants de cette production et la nature constitue la société considérée dans sa structure économique…"
L'appareil de production capitaliste apparaît donc, à l'échelle de l'histoire humaine, comme "une forme historiquement déterminée du procès de production sociale…", à la fois :
1) un procès de production de la vie humaine,
2) un procès spécifique s'opérant dans des conditions matérielles de la vie humaine,
3) un procès spécifique s'opérant dans des conditions historico -économiques,
4) produisant et reproduisant ces conditions de productions, et par conséquent
5) les représentants de ce procès,
6) ses conditions matérielles
et 7) leurs relations ;
c'est-à-dire leur forme sociale et économique…
L'histoire humaine crée, à sa phase la plus simple, un rapport immédiat de l'homme à la nature. Ce rapport devient un rapport médiatisé de l'homme à la nature par l'intermédiaire de l'outil. Ce rapport extrêmement simple devient à son tour :
l'homme et ses rapports avec l'homme (rapports sociaux de propriété et par conséquent différentes fonctions dans la production),
les rapports des hommes entre eux déterminés par leurs rapports dans la production ;
l’ensemble constituant le rapport médiatisé de l’homme (humanité) avec la nature.
L'histoire est donc le rapport du déroulement de la vie humaine dans ses relations avec la nature, par l’intermédiaire du déroulement de l'évolution de son système de production. Ce qui fait que, dans l’histoire, le capitalisme est lui-même une phase de ce rapport historico-naturel en sa qualité de mode de production de la vie humaine. Le capitalisme est à la fois, rapport de l'humanité avec la nature, mais aussi rapport social de l'homme avec lui, en tant que mode de production et rapport des hommes entre eux par son intermédiaire.
"(…) L'analyse scientifique du mode de production capitaliste prouve (…) que c'est un mode de production d'une espèce particulière, spécifiquement déterminée ; qu'il s'appose, à l'exemple de tout autre mode de production déterminé, un certain degré donné des forces productives sociales et de leur forme de développement comme sa condition historique ; condition qui, elle-même, est le résultat historique et le produit d'un procès antérieur et sur laquelle le nouveau mode de production s'élève comme sur son fondement ; que les conditions de production correspondant à ce mode de production spécifique et historiquement déterminé - conditions dans lesquelles les hommes se placent au cours de leur vie sociale - ont un caractère spécifique, historique et passager ; qu'enfin les conditions de distribution sont identiques à ces conditions de production, quel qu'en soit le pendant, en sorte qu'elles partagent le même caractère historique passager…" (Capital – Mol. – XIV-208)
Après avoir tenté, en empruntant uniquement à Marx et à Engels, de donner une idée de la situation historico-sociale du mode de production capitaliste, nous voulons maintenant leur emprunter leur conception sur ce qu'est effectivement le capitalisme et le CAPITAL.
Pour Marx, le CAPITAL est, dans la forme sociale-économique capitaliste, l’ensemble des moyens de production : pour Marx, les ouvriers sont du capital en tant qu’ils sont de la main d’œuvre exploitée ; les moyens de production sont du capital, les matières premières extraites du sol par les moyens de production capitalistes sont du capital en tant qu'elles sont investies dans la production ; la terre est du capital en tant qu’elle entre dans le cycle de production capitaliste. ( voir "Capital" - Mol. – XIV-122)
L'expression "propriété privée des moyens de production" exprime une tendance historique et non le fait que les individus possèdent effectivement d'une manière individuelle, absolue, leurs moyens de production. Cela exprime plutôt l'idée que, grâce au travail, les individus tirent des revenus et que leur tendance est, dans ce sens, individualiste mais dans ce sens seulement.
Les individus ne voient dans la production et dans le travail qu'un moyen de s'assurer une part de revenus en proportion du capital dont ils disposent, c'est-à-dire de leur situation dans cette production ; puisque, pour l’ouvrier, sa force de travail est son seul capital, il est obligé de placer ce capital et voit, en effet, là un placement qui lui rapporte sa journée de travail. Cette journée de travail a produit beaucoup plus que ce qu'il a reçu comme revenu et le fruit de ce travail, dont une partie lui est versée sous forme de revenu-salaire, lui est dans sa majeure partie extorqué ; et cette partie de travail non payé suit, dans la production capitaliste, le processus plus-value-profits. Ce processus est celui qui aboutit à aller verser des revenus aux capitalistes et aux propriétaires fonciers, sous forme d'intérêts et de rentes, revenus qui servent à entretenir une masse d'individus qui profitent de la distribution capitaliste de ces revenus.
Pour Marx, la propriété privée est fondée sur le produit du travail ; et la différence fondamentale du mode de production de la féodalité au capitalisme est que : le premier est une expression de la propriété privée fondée sur le travail personnel, sur un travail individuel ; le deuxième est une expression de la propriété privée fondée sur un mode de travail socialement organisé.
"(…) le système d’appropriation capitaliste découlant du mode de production capitaliste et, par suite, la propriété capitaliste constituent la première négation de la de la propriété privée individuelle fondée sur le travail personnel…" (Capital - Mol.-IV-274)
La propriété privée capitaliste est donc une propriété privée sociale, collective, de moyens de travail sociaux et collectifs et où les différentes classes sociales émargent au prorata de leur rôle dans la production :
les exploiteurs capitalistes en tant que directeurs de la production,
les ouvriers en tant que main d'œuvre exploitée.
La propriété privée capitaliste est donc, avant tout, une propriété de classe sociale et non simplement une propriété d'individus.
LES RAPPORTS DU CAPITAL ET DU TRAVAIL CONSTITUENT UNE PARTIE DES RAPPORTS ESSENTIELS SUR LESQUELS REPOSE LA PROPRIÉTÉ PRIVÉE CAPITALISTE.
"(…) Le mode de production capitaliste procède des modes antérieurs où les moyens de production étaient, en fait ou en droit, la propriété de l'exploitant, où l'agriculture n'était donc qu'un simple métier. Ce n'est que peu à peu que s’établit la concentration des moyens de production et leur transformation en capital, vis-à-vis des producteurs immédiats transformés en salariés…" (Capital - Mol.-XIII-97)
"(…) LE RAPPORT DE LA PROPRIÉTÉ PRIVÉE EST : LE TRAVAIL ET LE CAPITAL ET LEUR RELATION RÉCIPROQUE…" (déjà cité - Économie Politique et Philosophie)
"(…) Le travail en soi, comme activité productive à but déterminé, se rapporte aux moyens de production considérés non pas sous leur forme spécifique sociale mais dans leur substance matérielle, en tant que matière et moyen de travail ; et ces éléments, à leur tour, ne différent que matériellement, en qualité de valeur d’usage : la terre est un moyen de travail improductif et les autres moyens de travail sont productifs…"
(Ceci pour définir ce que Marx entend par travail : travail productif = l’homme, sa force de travail et ses outils)
"(…) Lorsque le travail coïncide donc avec le travail salarié, la forme sociale déterminée - sous laquelle les conditions de travail s’opposent maintenant au travail - coïncide avec leur existence sociale. Dans ce cas, les moyens de travail sont en soi du capital et la terre est en soi de la propriété foncière. La forme indépendante que les conditions de travail revêtent en face du travail et la forme spéciale qu'elles prennent vis-à-vis du travail salarié deviennent alors la propriété qui leur est inhérente du fait même qu’elles sont des choses, des conditions matérielles de production, un caractère immanent, inné, qu'elles ont nécessairement en leur qualité d’éléments de production…" (Capital - Mol.-XIV-122-123)
La société humaine a fabriqué des outils pour ravir sa subsistance à la nature. Il lui a fallu lutter contre les différents fléaux, lutter contre le froid et la faim. De cette lutte, l'humanité a progressivement augmenté sa capacité de domination de la nature. De cet ensemble, au fur et à mesure que se développaient leurs capacités, que la lutte s'organisait, les hommes se sont développés en nombre. Les hommes se sont multipliés à chaque fois davantage quand ils faisaient un pas en avant dans leur sécurité dans la nature. Mais l’histoire voit peu à peu se compliquer les rapports sociaux.
Les rapports sociaux deviennent combinés en fonction :
du développement progressif et successif des moyens de production,
des rapports qui se créent au travers de ces moyens de production : rapports de propriétés, fonction dans la production.
En système capitaliste, quand la propriété privé capitaliste des moyens de production est à la base de l'activité humaine en vue d'assurer ses moyens de subsistance de la nature, les rapports entre les différents individus qui composent cette société sont régis de la manière suivante :
le travail salarié se présente comme force de travail et comme classe sociale ;
les conditions de travail leur sont opposées (dans le sens où les ouvriers sont contraints de livrer leur force de travail, de par leur condition sociale elle-même) ;
ces conditions de travail sont en soi du CAPITAL.
Donc, le caractère des rapports du CAPITAL et du TRAVAIL, c’est que le TRAVAIL se présente au CAPITAL pieds et poings liés ; il apporte sa force de travail ; la fonction du capital dans la production est donc la production elle-même, sa direction, et la répartition capitaliste qui en découle.
La propriété privée des moyens de production capitaliste est donc une propriété privé sociale de CAPITAL opposé au TRAVAIL, sous sa forme sociale de force sociale de travail : le prolétariat.
Nous en venons, toujours en nous appuyant uniquement sur des textes intégraux de Marx, à l'explication de la dernière partie du schéma de "Économie Politique et philosophie", déjà cité au début de ce chapitre.
"(…) Opposition de chacun contre soi-même :
Capital = travail accumulé = travail. Comme tels, ils se décomposent en soi-même et les intérêts, et puis en intérêts et bénéfices. Disparition absolue du capitaliste…"
Le capitaliste particulier, au début possesseur des moyens de production, s'appropriant lui-même directement la force de travail dans son usine, puis réalisant lui-même la plus-value, puis accumulant et réinvestissant, n'a jamais existé à l'état pur. La division du travail capitaliste s'applique à toutes les classes et à toutes les fonctions de cette société. Nous nous retrouvons donc avec des grandes subdivisions sociales :
PRODUCTEURS : ouvriers = travail salarié
MOYENS DE PRODUCTION = 1) usines, machines
2) matières premières
3) force de travail =
1) – 2) – 3) = CAPITAL ; 1) et 2) =capital constant ; 3) = capital variable.
Le capital constant est du travail humain accumulé sous forme de machines, d’usines etc., donc le capitaliste disparaît en tant que personnification du travail humain accumulé ; le CAPITAL devient un fait social duquel le capitaliste devient chaque jour un peu plus étranger. Le procès de production se fait, mû par des forces capitalistes, mais le capitaliste individuel n’est plus le moteur de ces forces ; il est lui-même mû par les fores productives que ses pères ont engendré ; le CAPITAL est donc indépendant du capitaliste. Le capitaliste disparaît d'une manière absolue pour réapparaître sous une autre forme capitaliste, en tant que le CAPITAL se divise en lui-même et les intérêts ; il (le capitaliste) apparait maintenant en encaisseur d'une forme de revenus appelés intérêts, d'une autre forme appelés bénéfices et d'une autre appelée rente foncière (il peut d’ailleurs cumuler sans que rien ne soit changé).
"(…) Disparition absolue du capitaliste. Il est incorporé à la classe ouvrière tout comme l'ouvrier – mais à titre exceptionnel devient capitaliste. Travail en tant qu'élément du capital, ses frais. Donc le salaire victime du CAPITAL…"
"Travail en tant qu’élément du capital..." s'explique aisément une fois que nous avons mis, dans le mode de production capitaliste, tous les éléments en présence : le travail d'une part et le capital de l'autre.
Tous les individus - qui, en tant qu'éléments du capital, participent à la production - font partie de la classe capitaliste et constituent, pour leur entretien, les frais dont il est question et qui représentent les profits. Toutes les tâches d'organisation, de direction, de rationalisation, d'administration, de répartition, sont des fonctions salariées du CAPITAL.
Il y a donc le travail dans la production en tant que salarié du TRAVAIL (capital variable) et le travail en tant que salarié du CAPITAL (profits : intérêts, bénéfices et rente foncière).
Le travail en tant qu'élément du CAPITAL n’est productif que de CAPITAL ; et cela par l'intermédiaire du travail salarié exploité.
"(…) Pour que les conditions de travail produites et les produits du travail en général prennent la forme de capital vis-à-vis des producteurs directs, il faut tout d’abord que les conditions matérielles du travail aient, vis-à-vis de l'ouvrier, un caractère social déterminé et que, par conséquent, elles se trouvent, dans la production, dans un rapport déterminé avec les propriétaires des conditions de travail et entre elles-mêmes…" (Capital - Mol. – XIV - 210)
(I chapitre à suivre)
PHILIPPE
"Cette mobilité du capital et du travail est, somme toute, la condition réelle de la formation du taux de profit général. Elle suppose l’indifférence par rapport à un travail déterminé. Il se produit en réalité, aux dépens de la classe ouvrière, un frottement : d'une part la division du travail et le machinisme donnent à la force de travail un caractère particulier, et d’autre part cette force de travail n'est, en face du capital, que la possibilité vivante de n'importe quel travail. Suivant le profit à réaliser ici ou là, on donnera à la force de travail telle ou telle direction et on la fera passer d’une sphère dans une autre…" (Histoire des doctrines économiques - VIII-ll3)
"Ce qui distingue le capitaliste du capital, c'est qu'il lui faut vivre et, pour cela, consommer à tout instant une partie de la plus-value. Plus se prolonge la période de production, c'est-à-dire plus il doit attendre pour vendre sa marchandise et en toucher le prix, et plus il est forcé de vivre à crédit, à moins qu'il n'ait accumulé de l'argent qu'il puisse dépenser comme revenu. Il doit d'autant plus longtemps se faire l'avance de son propre revenu. Et il faut que son capital soit d’autant plus grand. Et il est forcé d'en laisser constamment en friche une partie comme fonds de consommation…" (idem - VIII-115)
"(…) Sans parler de la terreur que la loi de la baisse tendancielle du taux de profit inspire aux économistes, elle a cette conséquence très importante de supposer une concentration sans cesse croissante des capitaux, c'est-à-dire la dépossession progressive des petits capitaliste. Cela est d'ailleurs le résultat de toutes les lois de la production capitaliste. Que signifie au fond ce progrès de la centralisation, dépouillé du caractère contradictoire que lui imprime la production capitaliste ? Simplement que la production perd son caractère privé pour devenir un procès social, réel et non purement formel. (Dans tout échange, la production est sociale quant à la forme, à cause de la dépendance réciproque des producteurs et de la nécessité de donner leur travail comme travail social abstrait.) Les moyens de production deviennent communs et les travaux sont effectués à une échelle sociale." (idem - VIII-119)
[Fraction de la Gauche Communiste International]
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