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Nous publions ici deux types de correspondances échangées, l'une avec le groupe Perspectives Internationalistes, l'autre avec le CCI. Ces correspondances qui nous ont été adressées, illustrent malheureusement le degré de détérioration atteint dans la conception des relations entre groupes du camp prolétarien pour quelques uns d'entre eux. Ce n'est pas la partie saine de la Gauche communiste qui subit les conséquences négatives d'un tel état d'esprit, c'est malheureusement surtout la classe ouvrière qui en subit d'ores et déjà les dommages.
AUX CAMARADES DE LA FICCI
Camarades,
Deux camarades de la Fraction interne du CCI ont participé à la réunion de discussion que Perspective Internationaliste a organisée à Paris le 16 novembre 02. Ignorant la situation politique réelle des deux camarades, nous avons préféré laisser se dérouler la discussion plutôt que de faire perdre le temps des participants en vaines polémiques.
Aujourd'hui, les informations qui nous ont été communiquées à propos de votre lien politique avec le CCI nous amènent à vous demander de vous situer clairement et officiellement par rapport à notre groupe. En effet, le CCI nous a publiquement dénoncés, ainsi que d'autres groupes politiques tel le CDP, comme étant un groupe politique parasite nuisible aux intérêts du prolétariat (accusation grave s'il en est !) et, en toute logique avec cette position, a développé une politique de sabotage et de dénonciation dans nos réunions publiques. Cette attitude nous a amené à ôter à nos réunions leur caractère public et à en exclure systématiquement le CCI.
Qu'en est-il de votre position à ce sujet ? Pensez-vous que P.I., ou le CDP constituent des/un groupes parasites et toxiques pour notre classe ? Dans le cas contraire, nous attendons de votre part une dénonciation sans la moindre ambiguïté de cette affirmation. Il va de soi que votre présence à nos réunions est conditionnée par votre prise de position. Nous vous adressons nos salutations communistes,
Perspective Internationaliste.
La Fraction interne du CCI à Perspective Internationaliste
Camarades,
Nous avons bien reçu votre message du 10/12/2002 dans lequel vous dites notamment que la présence de 2 de nos camarades à votre dernière réunion de discussion (vous) amènent à (nous) demander de (nous) situer clairement et officiellement par rapport à (votre) groupe. C'est bien ce que nous allons faire ici à travers ce courrier.
Pour nous, se situer clairement et officiellement , c'est répondre à une seule question. Non pas celle de savoir si votre organisation est (ou non) un groupe parasite ou opportuniste ou autre, mais celle qui est posée par la sommation et la menace , à notre égard, qui sont contenues dans votre courrier : sous une forme triviale, on peut dire que, pour participer à vos réunions, vous exigez que nous montrions patte blanche , sinon vous nous claquerez la porte au nez .
Camarades, que vous le vouliez ou non, une telle démarche tient plus de l'ostracisme et du sectarisme que d'une attitude prolétarienne, laquelle est avant tout basée sur un principe fondamental, celui de la nécessité vitale du débat politique le plus large et le plus ouvert possible pour notre classe, si elle veut être capable d'assumer ses responsabilités de classe révolutionnaire.
Le débat en son sein, c'est-à-dire la confrontation d'idées et d'opinions parfois contradictoires, voire antagoniques, est un des principaux vecteurs de sa prise de conscience et s'inscrit donc totalement dans son combat historique. C'est, en tout cas, ce que nous enseigne l'histoire du mouvement révolutionnaire.
Mais, ce que nous avons aussi appris, c'est que ce débat est, en lui-même, un combat et non un simple échange d'idées sans conséquences. De ce fait, il est possible (et parfois nécessaire) qu'il prenne un tour difficile, âpre et même violent (dans les termes). C'est une possibilité qui n'a jamais été redoutée, ni encore moins condamnée ou écartée par les communistes. Il n'est pas question, pour nous, de nous baser sur cette possibilité pour définir la totalité de notre conception du débat. Mais, en tant que communistes, en tant que fraction la plus résolue du prolétariat, nous n'avons pas à chercher à l'éliminer et encore moins à en avoir peur. C'est un minimum de courage dont nous devons faire preuve et que notre classe est en droit d'exiger de nous.
La conception du débat comme un échange d'idées calme et serein, entre gens de bonne compagnie , n'est, de toutes façons, pas celle du mouvement communiste et donc pas la notre. Pour nous, le débat entre communistes n'a de sens d'abord que s'il participe clairement et concrètement du combat de notre classe. Il n'a de sens aussi que s'il est ouvert à tous, même (et surtout) à ceux qui nous sont le plus opposés. C'est ce qu'a défendu Rosa Luxemburg, en 1910, dans une polémique qui l'opposait à Kautsky sur la question de la grève de masse :
Mais le camarade Kautsky évoque encore d'autres effets néfastes d'un débat public : Je regretterais beaucoup, écrit-il, que l'article de la camarade Luxemburg ait pour résultat de susciter dans la presse du Parti une discussion passionnée dans laquelle une des parties en présence viendrait expliquer pourquoi, à son avis, la grève de masse n'a aucun sens aujourd'hui. Que les tenants de cette position aient tort ou raison, il est certain qu'un tel débat ne peut en aucun cas être un stimulant pour l'action.
C'est là un point de vue qui m'est totalement incompréhensible et que la social-démocratie n'a encore jamais défendu jusqu'alors. Jamais nous n'avons cherché à stimuler pour l'action en répandant des illusions ou en camouflant la réalité aux masses. Si les adversaires de la grève de masse ont raison, si leurs arguments expliquant qu'une telle action ne peut conduire qu'à l'impasse sont fondés, alors il est tout à fait salubre et nécessaire que nous entendions leurs raisons et nous rangions à leur avis. Et s'ils ont tort, il est tout aussi salubre et nécessaire qu'il soit reconnu publiquement que leurs raisons ne résistent pas à l'examen. La discussion approfondie ne peut dans ce cas qu'être utile et contribuer à éclairer le Parti, attirer notre attention sur les faiblesses de notre mouvement et nous indiquer quelles sont les tâches prioritaires de notre agitation ou de notre organisation. (Article paru dans le Neue Zeit sous le titre : Usure ou combat )
Vouloir éliminer un point de vue qui ne nous convient pas et écarter les uns ou les autres d'une discussion pour une quelconque raison, c'est tourner le dos à cette conception et c'est, même involontairement, s'opposer aux intérêts du prolétariat. C'est ce principe fondamental qu'en tant que fraction nous ne cessons de défendre, depuis plus d'un an, contre la direction liquidationniste actuelle du CCI qui nous a exclus, justement du fait que nous avions des désaccords politiques et que nous refusions de les taire. Doit-on penser que, sur ce plan au moins, vous allez vous retrouver en accord avec le CCI d'aujourd'hui ?
Pour conclure, il nous semble que ce n'est pas à nous de répondre à votre sommation mais à vous de prendre position sans détours et sans ambiguïté par rapport à la question politique essentielle que nous posons ici. Votre décision à notre encontre ne dépend que de la réponse que vous lui apporterez.
Salutations communistes
La Fraction interne du CCI (le 23/12/2002)
Le 25 décembre 02.
Camarades,
Nous avons pris connaissance de la réponse que vous avez faite à notre lettre. Nous prenons acte du fait que, bien que notre courrier vous demandait une prise de position claire sur la question des groupes parasites , vous passez cette question totalement sous silence. Nous en concluons donc que vous restez en accord avec la position du CCI sur la question mais que des considérations d'ordre tactique vous empêchent de formuler vos positions au grand jour.
C'est pourquoi nous considérons que vous n'avez pas votre place dans les réunions de discussions que nous organisons, et ce pour les mêmes raisons que pour le CCI.
Salutations communistes,
Perspective Internationaliste."
La section du CCI en Allemagne (8.11.2002). Nous vous demandons d'arrêter immédiatement tout envoi à notre adresse interne en Allemagne.
(Signé) La section du CCI en Allemagne.
La Fraction Interne du CCI
A Welt Revolution, Section en Allemagne du CCI
Paris, le 23 décembre 2002
Chers camarades,
Nous répondons à votre courrier du 8 décembre dès réception.
Vous nous demandez d'arrêter de vous envoyer du courrier à votre 'adresse interne en Allemagne'. Fort bien !
S'agit-il d'une question liée à la sécurité, aux nécessaires précautions qu'il convient de prendre face à l'Etat bourgeois et à ses services de police ?
Si tel est le cas, il va sans dire que nous ferons tout pour éviter de faire courir des périls à nos camarades d'organisation. Mais dans ce cas, nous vous demandons, à notre tour, de nous faire parvenir des adresses 'sures' auxquelles nous pourrons expédier notre matériel politique.
S'il ne s'agit pas de telles questions mais seulement de ce que nous serions tentés de considérer comme la préservation de votre propre 'confort intellectuel' ou, pire, d'une tendance au repli sectaire, il ne saurait être question pour notre Fraction de renoncer à accomplir sa tâche politique.
Pour nous, en effet, étant empêchés depuis plus d'un an de défendre notre point de vue à travers les voies normales de notre organisation, notre bulletin est la seule façon que nous avons de faire connaître nos positions à nos camarades et donc de défendre notre organisation contre ce que nous analysons comme une dérive opportuniste et sectaire.
Que vous ne partagiez pas notre analyse aujourd'hui, nous en sommes bien conscients ; que nos prises de positions vous déplaisent ou vous contrarient, nous pouvons le concevoir.
Pour autant ce ne sont pas ces considérations qui nous déterminent. Ce qui nous détermine, c'est notre conviction que la démarche et la méthode adoptées par notre Fraction, que les analyses qu'elle met en avant sont les seules en mesure de redresser notre organisation. Ce qui nous détermine, c'est notre engagement de militants communistes à défendre les positions dont nous sommes convaincus et de favoriser le débat fraternel entre révolutionnaires, même sur les sujets les plus controversés. Cela, c'est dans le CCI, voilà 20 ou 30 ans, que nous l'avons appris et, pour ce qui nous concerne, nous entendons bien rester fidèles à ces leçons que le camarade MC nous a transmis de l'expérience de la Gauche Communiste.
Aussi, nous continuerons de vous faire parvenir notre matériel politique parce que nous considérons que c'est notre devoir de communiste de le faire.
Que vous décidiez de ne pas en tenir compte, de ne pas les lire, de les jeter sans même les ouvrir, nous ne pouvons - bien sûr ! - rien faire pour vous en empêcher. Mais là, c'est VOTRE responsabilité de militants qui est en jeu.
Pour notre part, nous assumons et assumerons nos responsabilités quoiqu'il en coûte. A vous de vous déterminer.
Avec nos fraternels saluts Communistes, la fraction.
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